Cameroun. Le Coronavirus affecte la santé mentale

Dr Menguene: "Le remède de la santé mentale c'est le bien-être".

Anxiété, angoisse, dépression, stress et perte de repères rythment le quotidien des populations.

Stress, anxiété, angoisse, dépression, perte de repères. Voilà autant de maux qu’engendre au sein de la population depuis sa survenue, la pandémie mondiale de Coronavirus. Des afflictions qui peuvent résulter du flux d’informations, des mesures de confinement et de la peur qu’éprouvent certains face au virus mortel.  L’OMS considère d’ailleurs que les conséquences du Coronavirus sur la santé mentale et le bien-être psychologique sont très importantes.

Au Cameroun, le nombre sans cesse croissant des cas testés positifs et l’assouplissement des mesures en rajoutent à cette fragilisation de la santé mentale. « L’épidémie me fait peur. Prendre par exemple le taxi est un cauchemar. Surtout depuis l’assouplissement des mesures », confie Nafissatou Adamou, l’un des responsables du service Information dans une structure publique. La même inquiétude habite Christine Ombolo, employée de bureau.

« J’ai peur de croiser le Covid-19 chaque fois que je sors. Je stresse quand je dois prendre le taxi. Et au retour, je ne sais jamais si j’ai fait assez attention ; si je ne vais pas avoir les symptômes bientôt », précise cette dernière. « J’ai développé une sorte de paranoïa dès l’annonce des premières mesures de confinement. Mes enfants et moi vivions vraiment confinés depuis lors. Même avec mon époux, nous avons arrêté tout geste affectueux», indique Barbara, ménagère.

Du fait de son statut de personne à risque, la situation est beaucoup plus complexe pour Nicole Nkodo, ménagère. « Je suis vraiment stressée. Surtout avec ma grossesse, je ne sais pas comment cela va se passer. J’ai fait deux mois sans honorer les rendez-vous de mes visites prénatales », fait-elle savoir. D’après les spécialistes de la santé mentale, cette maladie est davantage psychologique que physique. Ceci, du fait de la peur, de la stigmatisation, de la honte et du mal être qu’elle engendre. « Surtout que nous sommes tous à risque ».

Accompagnement psychologique ciblé

Dans cette crise sanitaire mondiale, « L’accompagnement psychologique joue un rôle capital », précise le Dr Laure Menguene, Sous-directeur de la santé mentale au ministère de la Santé publique (Minsanté). Et donc, «Tout le monde doit bénéficier de l’accompagnement psychologique », indique-t-elle. Seulement, pour l’heure, il est uniquement dédié aux patients et personnels de santé.

« C’est très difficile pour eux. La plupart fait face à un stress continue et extrême. Ils n’ont jamais vécu ce genre de situation et la mort est une thématique plus que présente car à chaque fois qu’ils veulent sauver des vies, ils s’exposent aussi. Les conditions de travail peu adéquates ne facilitent pas aussi les choses », justifie Didier Demassosso, psychologue clinicien.

Selon lui, en raison de leur proximité avec les patients infectés, inquiétudes, stress chronique, incertitude, dépression et de traumatisme sont en gestation au sein du corps médical. Raison pour laquelle au Centre des Opérations d’Urgences de santé publique (Cousp), il a été créée une unité de prise en charge psychologique au sein de laquelle plusieurs activités sont menées.

D’abord, l’accompagnement psychologique des personnels de santé. « Parfois, ce personnel soignant est dans un état de panique. Et on est là pour les aider à gérer ce stress », explique le Dr Laure Menguene. Le Réseau des Médecins de District du Cameroun (Remedic) a également mis sur pied une cellule de suivi psychologique des personnels de santé affectés par la crise.

Ce soutien s’applique aussi au staff administratif et à tous ceux qui interviennent dans la riposte. « On organise avec eux, des réunions de débriefing pour qu’ils puissent évacuer leurs frustrations, leurs émotions, leurs colères, pour pouvoir repartir sur de bon pied. Il y a aussi les formations parce qu’il faut capaciter les formations sanitaires sur les premiers secours psychologique, la confidentialité et la gestion du stress », poursuit le Dr Menguene, par ailleurs chef de l’unité PEC psychologique au Cousp.

L’accompagnement psychologique des cas hospitalisés occupe aussi une place de choix. « Nous prenons attache avec eux, identifions leur besoin, assurons leur accompagnement, leur donnons le maximum d’informations dont ils ont besoin et les aidons à gérer le stress », informe notre source.

Gestion du stress

Selon elle, « Dans la communauté on est aussi souvent appelé pour gérer les états de paniques, la remise des résultats positifs qui incombe également aussi au personnel de santé mental ». Lors des descentes sur le terrain donc avec des équipes des EIR, ce personnel de santé mentale fait un counselling sur la pandémie, en vue de préparer le patient à un résultat éventuellement positif ou négatif.

« Bien entendu, chaque fois que nous faisons ces accompagnements psychologiques, nous aidons l’individu à gérer le stress », informe le Dr Laure Menguene.  En effet, la sensibilisation sur la gestion du stress et lutter contre les méfaits de la crise sanitaire sur la santé mentale demeure le challenge.

Le Dr Laure Menguene conseille par exemple d’identifier les facteurs du stress stressé. Ceux-ci peuvent aller de la fatigue inexpliquée à la perte de sommeil, en passant par l’expression inappropriée de la colère, de la peur. Il faut en outre identifier les pensées négatives et les accepter comme faisant partie de la réalité ; mener une activité qui procure le bonheur, identifier ses sources de bonheur ; éviter les situations ou des personnes qui vous stressent ou ont un impact négatif sur vous. « Soyez calme, souriant et mener une activité sportive », conclut-elle.

Réaction.

Dr Laure Menguene, Sous-directeur de la Santé mentale au Minsanté.

« Il est prévu des posts de soutien psychologique au niveau du call center »

Tout le monde doit bénéficier d’un soutien psychologique. Mais pour le moment, on ne peut pas faire l’accompagnement psychologique de chaque camerounais. Il est prévu au Minsanté, de créer quelques posts. Ils seront ouverts à toute la population. On est donc entrain de mettre sur pied ces posts d’écoute, de soutien psychologique au niveau du call center. Tout le monde en a besoin. Et plus que jamais, communiquons sainement. Aidons nos populations à gérer leur stress ; à gérer sainement le Coronavirus.

Journaliste diplômée de l'École supérieure des sciences et techniques de l'information et de communication (Esstic) au Cameroun. Passionnée et spécialisée des questions de santé publique et épidémiologie. Ambassadrice de la lutte contre le paludisme au Cameroun, pour le compte des médias. Etudiante en master professionnel, sur la Communication en Santé et environnement. Membre de plusieurs associations de Santé et Politique, dont la Fédération mondiale des journalistes scientifiques (WFSJ) et le Club des journalistes politiques du Cameroun (Club Po). Très active sur mes comptes Tweeter et Facebook.
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