Lurgentiste.com – Le président Paul Biya a signé, le 31 juillet 2025, un décret autorisant un emprunt de 15 milliards de FCFA (environ 23 millions d’euros) auprès de Standard Chartered Bank, garanti par UK Export Finance. Ce financement servira à reconstruire l’hôpital Jamot de Yaoundé et à ériger un hôpital psychiatrique à Mfou, en périphérie de la capitale.
Attendu depuis plus de 10 ans
L’initiative vise à renforcer l’offre de soins spécialisés dans deux domaines jugés prioritaires : la pneumologie et la santé mentale.
L’hôpital Jamot sera transformé en un centre gastro-pneumologique moderne de 200 lits, tandis qu’un établissement psychiatrique distinct de 150 lits sera construit à Mfou.
Selon le ministère de la Santé publique, les fonds permettront d’acquérir des équipements médicaux de pointe importés du Royaume-Uni. L’objectif est de réduire les coûteuses évacuations sanitaires à l’étranger, qui représentent environ 10 millions de dollars par an.
Le projet devrait aussi générer près de 1 000 emplois directs et stimuler l’économie locale. Il s’inscrit dans le cadre de la Stratégie nationale de développement (SND30), qui prévoit la modernisation des infrastructures hospitalières.
Cependant, un défi majeur persiste : le manque de personnel spécialisé. Le Cameroun ne compte que 0,04 psychiatre pour 10 000 habitants, alors que le ratio recommandé par l’OMS est de 1 pour 10 000.
Zones d’ombre sur le calendrier et le financement
Le projet est présenté comme un tournant stratégique pour le système de santé camerounais, avec l’ambition de faire des deux hôpitaux des centres de référence sous-régionaux. Cependant, plusieurs points restent flous. Le calendrier précis des travaux n’a pas été communiqué. La répartition des fonds entre l’hôpital Jamot et l’hôpital psychiatrique de Mfou n’a pas été détaillée. De plus, les mesures prévues pour garantir l’accès aux soins des populations les plus vulnérables n’ont pas encore été annoncées.
Par ailleurs, le niveau d’endettement du Cameroun, qui atteignait 44,7 % du PIB en mars 2025, suscite des inquiétudes concernant l’impact budgétaire de ce projet.
Le ministère de la Santé devra clarifier ces zones d’ombre et impliquer les communautés locales, notamment à Mfou, afin d’assurer l’adhésion sociale et la durabilité de cette initiative.
Malgré ces incertitudes, le projet marque une avancée majeure. Il pourrait contribuer à répondre à la demande croissante en soins spécialisés dans un pays où 37 % de la population vit sous le seuil de pauvreté.
Une direction confiée à un expert reconnu
Pour piloter la modernisation de Jamot, le Dr Daniel Ekoua, âgé de 57 ans et cardiologue de formation, a été nommé directeur le 28 février 2025. Récompensé en 2023 pour sa gestion à la tête des hôpitaux de Biyem-Assi et Djoungolo, il a désormais pour mission d’améliorer la qualité des soins, d’optimiser les conditions de travail du personnel et de mettre en place une gouvernance hospitalière plus performante.
Dans le milieu médical, sa nomination a toutefois suscité des polémiques en raison de sa proximité réputée avec le ministre de la Santé, Manaouda Malachie. Au Minsante on justifie néanmoins ce choix par son expérience confirmée en santé publique.