Lutte contre le coronavirus. Le gouvernement consent à démobiliser 150 volontaires

Ils ont au préalable revendiqué le paiement de leur prime de transport.

Près de 24 heures de pied de grue. C’est le temps qu’a duré le mouvement de grève initié par plus de 150 volontaires et personnels de santé commis à la riposte contre le coronavirus au Centre des Opérations d’urgences de santé publique (Cousp) à Yaoundé. Sur le corpus des revendications, le paiement des arriérés des primes de transport pour le période allant de 3 avril au 1er mai 2020.

Le montant de cette prime journalière reversée aux médecins, épidémiologistes, psychologues, infirmiers, hygiénistes, agents du call center, communicateurs, personnel d’appui et laborantins est de 10 000 Fcfa. « Il s’agit du personnel impliqué en première ligne sur le terrain dans les différents sites abritant les malades et les domiciles personnels. Chacun réclamait son dû, en fonction du nombre de jours d’émargements », explique M. Nga, l’un des grévistes de l’unité Wash.

100 millions de Fcfa pour les arriérés

La négociation entamée par le gouvernement après la nuit tourmentée du samedi 02 au dimanche 03 mai dernière a finalement abouti au paiement des primes revendiquées par le personnel sanitaire. Le Minsanté a ainsi consenti de reverser à chacun un montant au prorata du nombre de jour effectif de travail.

De sources officielles, une somme de 100 000 millions de Fcfa a ainsi été décaissée à cet effet. « Nous avons reçu notre argent malgré quelques tripatouillages pour réduire la somme de ce qui devait revenir à chacun », s’est plaint un gréviste. Ce dernier qui indique avoir travaillé pendant « au moins 26 jours », n’aurait reçu que le paiement de 20 jours.

Le film de la grève

Tout commence dans l’après-midi du samedi 02 mai 2020, lorsque les volontaires sont informés de ce qu’une partie de l’effectif sera démobilisée. La décision du staff du Cousp est mal perçue par les près de 150 personnes concernées. Ce d’autant plus que ces volontaires qui travaillent sans contrat ne sont pas rassurés que leurs arriérés de primes leur seront versés avant la séparation.

La situation dégénère et en guise de revendication, les manifestants barricadent l’entrée du Centre des Urgences. Le staff présent est pris en otage. Les grévistes exigent la présence du ministre pour mettre la situation au clair. Embarrassés par la tournure des événements, des responsables du Cousp tentent de négocier avec les manifestants et proposent aux grévistes de verser à chacun un taux forfaitaire de 75 000 Fcfa puis 100 000 Fcfa et enfin, 150 000 Fcfa.

Mais ces offres sont rejetées. « Pendant des jours, nous nous sommes sacrifiés pour la santé des populations, au péril de nos vies. La récompense de tous ces sacrifices c’est qu’on nous traite de terroristes, des menaces pour nos vies, des affectations disciplinaires », explique un médecin de l’une des Equipes d’intervention et d’investigation rapide (Eiir).

Le blocage perdure toute la nuit, jusqu’à l’arrivée le dimanche 3 mai, du gouverneur de la Région du Centre, Naseri Paul Bea. Il est environ de 8 heures. Face à ténacité des grévistes, l’autorité administrative ordonne de faire sauter les verrous du portail. S’en suit une première concertation qu’il préside en présence Sous-préfet de Yaoundé 2, du Dr Fanne Mahamat, du DRH/Minsanté et de cinq représentants de chaque secteur. Un terrain d’entente est trouvé et les premières résolutions tombent. Vers 12h, le Minsanté fait son entrée au Cousp. Après s’être rassuré que tout rentre progressivement dans l’ordre, il instruit la mise sur pied de plusieurs postes de paiements.

Incertitudes pour la suite

« Si Nous sommes arrivés à ce stade, c’est parce que nous n’avions pas de choix. Il fallait faire entendre nos voix et le ministre nous a dit qu’il n’était pas au courant de ce qui se passait ici. Donc, nous avons suffisamment éclairé sa lanterne », rapporte M. Nga, enrôlé dans l’équipe du Wash. Tout semble donc rentrer dans l’ordre. Sauf que, « Nous ne savons pas si on a été retenu ou pas. Ils nous ont juste dis qu’il y aura une 2e liste mais nous n’avons aucune information à propos », s’inquiète l’un des volontaires du Wash.

En réalité, « Tous n’est pas clair. Nous n’avons pas trouvé nos noms sur les listes. Nous ne savons pas quel est notre avenir, la décentralisation étant effective. Nous ne savons donc pas si nous serons mutés vers les Districts de santé avec une note ou nous serons maintenus pour continuer le travail ». Un médecin de l’Eiir lui, est formel : « Nous avons été mis à la porte », soutient ce dernier.

Aux sources du conflit

En réalité, le malaise couve depuis plusieurs semaines. Le 17 avril dernier, votre blog a révélé la discorde autour des primes autant dans les formations sanitaires, qu’au Centre des Urgences. Après avoir passé deux semaines sans percevoir leur dû, plus de 300 volontaires et personnels étaient alors aux abois. Surtout que par le passé, les primes n’auraient pas toujours été versées dans leur totalité aux bénéficiaires.

« Déjà qu’elle n’est pas régulièrement versée. Certaine semaine nous avions 30 000 FCFA, parfois 40 000 FCFA ou 50 000 FCFA. Ce qu’on supportait. Avant ils donnaient le transport mais depuis ils ne donnent plus », confiait alors un de ces volontaires. Les choses s’étaient davantage détériorées le lundi 13 avril quand ces primes ont été revues à la baisse. Passant ainsi de 10 000 Fcfa à 5000 Fcfa. « Certains de nos collègues ont même rédigé une lettre de grève. Ils se plaignaient de ce que leurs primes ne sont pas payées », informait un médecin en service au Cousp.

Interrogé à ce sujet, Manaouda Malachie, le Minsanté, a semblé minimiser la crise alléguant que le malaise n’est pas réel. « Les primes sont payées et seront même améliorées en fonction de la disponibilité des ressources », avait déclaré le Minsante. Sauf que la situation a fini par exploser…

Olive Atangana

Journaliste diplômée de l'École supérieure des sciences et techniques de l'information et de communication (Esstic) au Cameroun. Passionnée et spécialisée des questions de santé publique et épidémiologie. Ambassadrice de la lutte contre le paludisme au Cameroun, pour le compte des médias. Etudiante en master professionnel, sur la Communication en Santé et environnement. Membre de plusieurs associations de Santé et Politique, dont la Fédération mondiale des journalistes scientifiques (WFSJ) et le Club des journalistes politiques du Cameroun (Club Po). Très active sur mes comptes Tweeter et Facebook.

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1 réponse

  1. Pierre Serna dit :

    Merci pour le travail

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