Alors l’opinion redoute une 2e vague de contaminations au nouveau coronavirus au Cameroun, le médecin de santé publique s’étend sur l’immunité collective et son intérêt pour un pays comme le nôtre.
L’immunité collective dont on parle beaucoup depuis le début de l’épidémie au nouveau coronavirus peut-elle aider à limiter la recontamination au Cameroun ?
C’est une hypothèse de plus en plus probable. Une épidémie s’arrête quand la population a atteint l’immunité collective c’est-à-dire que le taux de transmission du virus est inférieur à 1. En d’autres termes, le nombre de personne qu’une personne infectée peut contaminer doit être inférieur à 1 pour que l’épidémie s’arrête. Et il faut qu’à peu prêt 60% de la population ait atteint cette immunité pour pouvoir arrêter la circulation du virus. L’immunité collective s’atteint donc de deux façons. Soit par le vaccin, c’est-à-dire si on a vacciné 60% de la population. Mais elle peut également s’atteindre de façon naturelle c’est à dire des personnes ont contracté le virus ; ont développé des résistances et deviennent donc immunisés contre le virus. De nombreuses études démontrent qu’il existe une certaine immunité naturelle notamment de type cellulaire qui concerne d’autres types de cellules tels que les lymphocytes, les macrophages, les cellules naturelles ; et l’immunité de type humorale qui concerne les anticorps, les vaccins. De plus en plus les études révèlent que l’immunité cellulaire est solide et assez durable chez un certain nombre d’individus. Je pense à titre personnel de plus en plus sur la base de mes nombreuses lectures, que le Cameroun n’avait pas les moyens de pouvoir mettre en place le confinement, n’a pas les moyens de pouvoir faire vacciner la population à cours et à moyen terme, subit donc cette immunité collective de type naturelle. Et ça à l’air de nous réussir si on en croit les statistiques qui régressent. On ne peut pas négliger l’impact des actions des autorités sanitaires mais vue le fait que notre confinement n’a pas été très strict, on peut penser qu’un mal pour un bien, cela a peut-être favorisé une transmission un peu plus rapide du virus peut-être à des formes moins virulentes qui a peut être entrainé cette immunité collective naturelle. Mais ça reste une hypothèse qui se devrait d’être confirmée par des études scientifiques. Par chances des équipes de recherches d’immunologues et d’immunologistes qui sont à pied d’œuvre à Yaoundé et entrain de travailler pour confirmer ou infirmer cette hypothèse.
Pouvez-vous rappelez à nos lecteurs ce qu’est l’immunité collective ?
C’est une immunité qui s’acquiert au sein d’une communauté quand au moins 60% de la population a été immunisé soit par le vaccin, soit de façon naturelle. C’est-à-dire quand 60% de la population contractent le virus, a développé des résistances, a développé cette immunité, le taux de production est inférieur à 1, la transmission s’arrête et on dit donc que cette population a atteint l’immunité. Elle sert à protéger une population de la progression d’un germe ou d’une épidémie. Si on veut être assez strict, elle se calcule sur la base de tests sérologiques. On fait des tests pour voir si le nombre de personnes qui ont développé des anticorps contre un virus sur un échantillon donné qui est assez représentatif, on trouve que c’est 60%, on peut penser que cette population a atteint une immunité collective. Le problème maintenant c’est que sur le Covid-19, les tests sérologiques ne semblent pas complètement fiable. Parce qu’il y a des personnes qui contractent le virus mais qui ne développent pas d’anticorps or il y a des personnes qui ont developpé une immunité contre le Covid-19 mais qui n’ont pas développé les anticorps. Donc calculer ce taux d’immunité collective sur la base d’anticorps devient assez problématique. On fait juste des hypothèses et projections avec une certaine marge d’erreurs.
Quel est l’intérêt de ladite l’immunité collective ?
Elle vise la protection d’une population contre la circulation d’un virus. C’est elle qui est recherchée dans les programmes nationaux de vaccination. Quand on vaccine, on ne peut pas vacciner 100% d’une population contre la méningite ou la rougeole par exemple. On essaie d’atteindre au moins 60 à 80% de la population pour que si un virus de ce type émane, que la circulation du virus s’arrête. Donc c’est l’immunité collective qui est poursuivie par la vaccination collective. Généralement c’est une immunité collective de type humorale qui se déroule par la production des anticorps mais dans le cas du Covid-19 c’est un mélange à la fois d’immunité humorale par la production d’anticorps mais aussi d’une immunité de type cellulaire par la production de certaines cellules.
Elle n’est néanmoins pas sans conséquences…
Il y a un risque humain parce que contracter un virus est toujours un risque en termes de gravité de la maladie et même de décès. C’est pourquoi c’est une stratégie qui ne peut pas être mise en place en Occident où il y a une bonne partie de la population qui est fragile notamment les personnes du 3e âge qui constituent les 1/5e de la population. Donc ils ne peuvent pas prendre le risque de mettre une immunité collective là-bas. Mais en Afrique la pyramide des âges est différente. C’est pour ça que ce n’est pas un choix chez les africains. Ils subissent ce choix qui a moins d’impact sur les populations africaines.