Cameroun. Le poids de la maladie d’Alzheimer pour les familles

Les personnes atteintes sont considérées comme des sorciers ou des démens et sont marginalisées dans la société car elles se retrouvent parfois dans des lieux inconnus et confondent tout comme par exemple appeler quelqu’un par le nom d’une autre personne.

La célébration de la journée mondiale de l’Alzheimer est presque passée sous cape le 21 septembre 2020. C’est que, cette pathologie neurodégénérative est peu, mal et ou méconnue au Cameroun. Elle est même souvent considérée comme de la folie ou de l’ensorcellement. « Ce sont des personnes que l’on considère dans la plupart des cas comme des individus atteints de démence », confirme Norbert Ngalaha, Coordonnateur national de l’Association « Comprendre la Maladie d’Alzheimer (ACMA) ».

Selon elle, la maladie d’Alzheimer est une maladie familiale parce qu’elle entraine une détresse, une souffrance psychologique face à l’être aimé qui perd progressivement son autonomie. « La charge quotidienne augmente face aux responsabilités inattendues : le poids des décisions est réel. Les confits et les tensions inattendus auxquels l’aidant principal doit faire face sont considérables », explique l’association.

Toutes choses qui font dire au Dr Mougué Louisa que, « Derrière un malade Alzheimer se cache une famille en souffrance. Ne l’ignorons pas: venons-leur en aide ».  En fait, lorsque la maladie d’Alzheimer ou les maladies apparentées (Mama) surviennent dans la vie d’une personne, la famille, les proches, vont constater un changement du comportement et cela va entrainer une souffrance de la famille. D’après quelques témoignages des familles, l’on observe chez les malades un changement d’humeurs qui se traduit par la colère ou de l’agressivité ; de comportements (anxiété), voire une incapacité à assurer leurs fonctions naturelles. En effet, ils se retrouvent parfois dans des lieux inconnus et confondent tout comme par exemple appeler quelqu’un par le nom d’une autre personne.

Selon les statistiques de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’Afrique ne compte que 8% de personnes atteintes d’Alzheimer sur les 33 millions de personnes qui sont touchées dans le monde. En effet, il est constaté qu’après 65 ans, 6 à 8% de la population mondiale est atteinte de démence et 4,4% de la maladie d’Alzheimer. Au Cameroun, si « les démences constituent le second motif de consultation en neurologie pour les personnes âgées de plus de 60 ans » tel que l’indique Norbert Ngalaha, il n’existe malheureusement aucun chiffre sur cette maladie qui se caractérise par la mort de neurones. « Cela s’explique par le fait que nous gardons nos malades dans nos maisons, au village. Nous ne les faisons pas connaître par les personnels de santé », indique Vanessa Francine Teugno, psychologue clinicienne. Plus grave, « Les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer sont considérées comme des sorciers, des démens et sont marginalisées dans la société», regrette le coordonnateur national de Acma.

« Maladie des blancs » et déni

En fait, « La MA a longtemps été considérée comme la maladie des blancs », fait savoir le Dr Daniel Gams Massi, neurologue à l’hôpital général de Douala. Pourtant selon nos sources, cet hôpital enregistre au moins un cas d’Alzheimer chaque semaine. Selon le neurologue, « Dans notre contexte les personnes âgées qui ont un trouble du comportement sont considérées comme sorcières. C’est le fait de cette stigmatisation sociale et culturelle qui fait que jusqu’à présent, beaucoup de familles préfèrent enfermer les patients à la maison au lieu de les emmener en consultation ». Aussi, les familles autant que les soignants et les pouvoirs publics ne semblent pas encore avoir cerné la maladie.

Voilà pourquoi l’Association « Comprendre la Maladie d’Alzheimer (Acma) », a organisé des activités à Yaoundé et Douala dans le but de d’informer la population sur l’existence et les conséquences de cette maladie. Tests gratuits de glycémie et groupe sanguin, prise de tensions, consultations mémoires, campagne de sensibilisation conférence débat sur le thème « Maladie d’Alzheimer et exclusion sociale » ont ainsi meublé la célébration de cette journée. Cette association ambitionne de lancer de l’unité de consultation mémoire « qui se veut être un pôle par excellence pour les troubles de la mémoire en général et la maladie d’Alzheimer en particulier », précise le Coordonnateur national.

Elle veut ainsi entre autres, améliorer la prise en charge des patients, favoriser une meilleure qualité de vie de ceux-ci, accompagner et former les aidants, assurer un meilleur suivi des malades par un recueil systématique des données sociologiques. En attendant la matérialisation de ce défis majeur pour Acma, elle oriente et accompagne les familles avant et après le diagnostic de la maladie avec la mise sur pied des Groupes de parole, le soutien psychologique, des bracelets d’identifications proposes et d’une unité de consultation mémoire pluridisciplinaire.

Encadré

Alzheimer en bref

La maladie se manifeste par différents troubles dont celui de la mémoire et du langage. C’est-à-dire la personne malade cherche ses mots. Elle souffre aussi d’un trouble des gestes au quotidien qui se traduit par des difficultés à utiliser les objets de la vie courante, à se laver, s’habiller, s’alimenter, etc… Un malade d’alzheimer souffre aussi des troubles de la reconnaissance. En d’autres termes, la personne a du mal à reconnaitre les personnes déjà vues ou connues et plus tard, il a du mal à reconnaitre les membres de sa famille. Les troubles du jugement et du raisonnement ne sont pas en reste. En fait, la personne éprouve des difficultés à s’orienter dans les lieux publics et plus tard dans les lieux familiers, à prendre des bonnes décisions. Le malade est par ailleurs aux prises avec des troubles et changements du comportement fréquents. Déambulation, agressivité, troubles du sommeil, dépression, anxiété, apathie, hallucinations, délires, troubles de l’alimentation, désinhibition, irritabilité deviennent ainsi son lot quotidien. Le Diagnostic de la maladie d’Alzheimer se fait par un gériatre, un neurologue, un psychiatre ou un médecin généraliste formé. Un Bilan neuropsychologique ainsi qu’une imagerie cérébrale sont nécessaires pour poser le diagnostic.

Journaliste diplômée de l'École supérieure des sciences et techniques de l'information et de communication (Esstic) au Cameroun. Passionnée et spécialisée des questions de santé publique et épidémiologie. Ambassadrice de la lutte contre le paludisme au Cameroun, pour le compte des médias. Etudiante en master professionnel, sur la Communication en Santé et environnement. Membre de plusieurs associations de Santé et Politique, dont la Fédération mondiale des journalistes scientifiques (WFSJ) et le Club des journalistes politiques du Cameroun (Club Po). Très active sur mes comptes Tweeter et Facebook.
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