Hôpital Laquintinie : Dr  Ndom Ebongue sur un chaudron… le cœur à l’ouvrage

Lurgentiste.com – Le mandat du Dr Marie Solange Ndom Ebongue à la tête de l’Hôpital Laquintinie de Douala a démarré sur un coup de théâtre. À peine nommée, ce médecin-cardiologue voit son équipe amputée de cinq médecins spécialistes. Tous sont mutés le 3 février 2025 à l’Hôpital général de Yaoundé, sur décision de Manaouda Malachie, ministre de la Santé publique. Le mouvement ne doit rien au hasard : ces praticiens rejoignent leur ancien patron, le Pr Noël Emmanuel Essomba, tout juste nommé directeur de cet hôpital de référence.

Autant le dire : en orchestrant ces mutations tous azimuts, le ministre Manaouda Malachie donnait un coup de pouce à son protégé, au détriment de l’Hôpital Laquintinie, délesté d’une partie précieuse de son corps médical. Car les médecins concernés ne sont pas des anonymes : ce sont des praticiens aguerris, artisans de la réputation d’un établissement devenu un maillon central de la prise en charge médicale à Douala.

Dans les cercles médicaux, la décision ministérielle provoque une vive polémique et suscite une vague d’indignation. Mais loin de se laisser ébranler par ce tacle irrégulier, la nouvelle directrice, le Dr Marie Solange Ndom-Ebongue, affiche un calme stoïque. « Ça ira. On va gérer », s’est-elle contentée de glisser à des proches inquiets. Dans son entourage, certains relativisent : « Cela laisse enfin de la place aux autres », commentent-ils.

Pression… galvanisante

Depuis sa prise de fonction le 13 janvier 2025 comme première femme directrice de l’Hôpital Laquintinie de Douala, le Dr Marie Solange Ndom-Ebongue n’a droit à aucun répit. Sous surveillance permanente, tant par ses soutiens que par ses détracteurs, elle assume cette pression avec philosophie : « C’est une motivation, une énergie qui me pousse à aller plus loin », confie-t-elle.

Elle a pleinement conscience des enjeux et du défi qui est le sien : pérenniser l’héritage de son prédécesseur et préserver le statut de centre hospitalier de référence, en y apportant sa touche personnelle, au cœur de Douala, réputée être la ville la plus sensible du Cameroun.

Après ses 200 premiers jours à la tête de l’établissement, le constat est que l’ex-conseillère médicale de Laquintinie tente d’imprimer sa marque dans tous les compartiments : gouvernance hospitalière, réformes, qualité des soins et climat social. Un engagement qui semble porter ses fruits. « Le climat social est apaisé, la qualité des soins s’améliore, la majorité des usagers sont satisfaits, les rénovations et la maintenance se font progressivement, les finances sont stables », se satisfait la direction.

Le pari de l’amélioration continue

Parmi ses innovations phares figure la création de la Maison du patient, un bureau d’écoute et de traitement des réclamations. « Une première depuis la création de cet hôpital », insiste-t-elle. Cette réforme s’ajoute à une vingtaine d’autres, toutes réalisées « sur fonds propres, avec validation du ministère de tutelle »

On peut citer : la sécurisation des recettes via le renforcement de l’audit interne ; la lutte contre la vente de médicaments non conformes ; la gratuité des consultations en pédiatrie générale et en soins prénatals ; la revalorisation et la régularité salariale ; ou encore l’amélioration du parcours patient, matérialisée par l’installation de ralentisseurs sur la voie d’accès à l’hôpital.

S’y ajoutent : la réfection du Centre mère-enfant et du centre de prise en charge personnalisée ; la réhabilitation du circuit d’approvisionnement en eau potable ; l’assainissement des services (évacuation et épuration des eaux usées) ; ainsi que le relèvement du taux de disponibilité des médicaments à 98 %. « Je l’avais trouvé à 50 % », rappelle celle qui a également présidé l’Association Médecins du Cameroun (Medcamer).

« Ces actions étaient urgentes et indispensables pour continuer à améliorer la qualité des soins, le cadre d’accueil, le confort et la sécurité des usagers », explique cette membre de plusieurs sociétés savantes, qui se dit animée par « la quête permanente de l’excellence ». Et de conclure : « Tout cela est conforme à notre engagement de faire du bien-être des patients, des usagers et du personnel notre priorité. »

Défis à venir

Le Dr Ndom-Ebongue ne compte pas s’arrêter là. Parmi ses prochaines priorités figurent : l’informatisation du dossier médical, la numérisation des archives administratives, le renforcement de la formation continue du personnel, et l’amélioration constante de la qualité des soins.

Dans le milieu médical, la directrice jouit d’un capital de sympathie avéré. Elle est reconnue pour son professionnalisme, son engagement et son dynamisme. « Elle va maintenir le cap à coup sûr, car c’est une vraie professionnelle de la santé qui sait que, pour une bonne prise en charge des patients, il faut au minimum un plateau technique et des conditions de travail optimales », affirme l’un de ses aînés académiques, médecin de santé publique et directeur d’hôpital.

Et ce dernier de poursuivre : « Elle connaît parfaitement l’environnement, puisqu’elle y exerce depuis plusieurs années. » Le Dr Ndom-Ebongue reconnaît que « beaucoup de choses ont été faites par le professeur Essomba ». Avant d’ajouter : « Toute œuvre humaine est perfectible. Aujourd’hui, nous avons d’autres priorités, sans comparaison ni critique. »

Peut mieux faire ?

D’autres confrères saluent les compétences cliniques du Dr Ndom-Ebongue et misent sur sa rigueur scientifique pour relever le niveau médical. « C’est une clinicienne pointue, qui veille à l’actualisation des connaissances scientifiques. Cela permettra d’aligner les soins aux standards les plus récents », note l’un d’eux.

Mais pour réussir pleinement sa mission, elle aura besoin de soutiens institutionnels solides. En effet, au-delà « du soutien des femmes, des jeunes et des élites locales, elle aura besoin de l’attention du ministère de la Santé, de l’État et de la mairie de Douala via le Comité de gestion », plaide ce même confrère. Pour l’heure, « les subventions publiques ont déjà été versées  », indique-t-on du côté de la direction.

Attentes persistantes

Malgré les efforts, des voix s’élèvent encore parmi les usagers, qui réclament une « meilleure qualité des soins », davantage d’« humanisme » dans les prises en charge et un « personnel plus accueillant ». La direction, elle, répond que « tout n’est pas parfait, mais beaucoup d’efforts sont fournis ».

« Nous proposons des soins de qualité, avec un plateau technique et une ressource humaine performante », argumente-t-elle, précisant que des enquêtes mensuelles sont menées par le département qualité pour évaluer la satisfaction des usagers à travers un questionnaire anonyme.

Créé en 1931 sous l’appellation « Hôpital indigène de Douala », l’Hôpital Laquintinie affiche aujourd’hui une capacité de 800 lits, avec un taux d’occupation de 80 %. Il emploie près de 1 500 personnes et enregistre une affluence moyenne de 5 000 personnes par jour (patients, visiteurs, garde-malades…). Il s’agit de la plus grande formation sanitaire du Cameroun en termes de capacité d’accueil. « Je me sens honorée et chanceuse d’avoir l’opportunité de pouvoir implémenter ma vision de la santé », confie le Dr Marie Solange Ndom-Ebongue, bien décidée à faire rayonner ce fleuron hospitalier au cœur de la capitale économique du pays.

 

Journaliste diplômée de l'École supérieure des sciences et techniques de l'information et de communication (Esstic) au Cameroun. Passionnée et spécialisée des questions de santé publique et épidémiologie. Ambassadrice de la lutte contre le paludisme au Cameroun, pour le compte des médias. Etudiante en master professionnel, sur la Communication en Santé et environnement. Membre de plusieurs associations de Santé et Politique, dont la Fédération mondiale des journalistes scientifiques (WFSJ) et le Club des journalistes politiques du Cameroun (Club Po). Très active sur mes comptes Tweeter et Facebook.
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