Lurgentiste.com – Le Cameroun célèbre ce 25 avril la 18e Journée mondiale de lutte contre le paludisme (JMLP), alors que cette lutte est plus que jamais sous tension. La menace de suspension des principaux financements internationaux pèse lourdement sur les efforts nationaux, au moment où les décès liés à la maladie repartent à la hausse.
Le signal d’alarme a été lancé par le Fonds mondial (FM), principal bailleur du Cameroun dans la lutte contre cette maladie. “Le FM menace de confier la gestion des subventions à d’autres partenaires en raison du non-déblocage des fonds de contrepartie et de la mauvaise gestion respectée”, confie une source proche du dossier au ministère de la Santé publique (Minsanté).
L’institution internationale exige le versement de 6,382 millions d’euros (4,186 milliards de F CFA) pour couvrir les fonds de contrepartie de l’année 2024, sur les 11,283 millions d’euros (7,4 milliards de F CFA) que l’État camerounais s’était engagé à fournir. À ce jour, ce paiement n’a toujours pas été effectué.
Gouvernance défaillante
Au-delà du problème de contrepartie, le FM pointe plusieurs dysfonctionnements dans la gouvernance du programme. Il s’agit notamment de la non-conformités dans la gestion des produits de santé, de lacunes dans la chaîne d’approvisionnement, de faiblesses dans le suivi financier, ainsi que des cas avérés de péremption, de détournements et de vols de médicaments subventionnés.
Une autre menace, tout aussi préoccupante, pèse sur le financement américain. Depuis 2020, les États-Unis injectent chaque année entre 20 et 22 millions de dollars (10 à 12 milliards de F CFA) dans la lutte contre le paludisme au Cameroun. Cet appui est destiné en priorité aux régions du Nord et de l’Extrême-Nord, particulièrement touchées par la maladie. Cependant, ce soutien est aujourd’hui en sursis.
À la demande du ministre de la Santé publique, les responsables du Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP) ont été instruits d’ « analyser en profondeur les priorités, hiérarchiser les actions et élaborer un plan d’atténuation des risques ». En parallèle, un plan de plaidoyer a été élaboré et transmis aux autorités compétentes pour mobiliser des ressources alternatives au sein de l’État, du secteur privé, des collectivités territoriales et d’autres départements ministériels. « Toutefois, la menace reste réelle », prévient un cadre du ministère.
Rebond des décès liés au paludisme
Sur le terrain, les statistiques sanitaires confirment une réalité alarmante. Le nombre de décès dus au paludisme enregistré dans les formations sanitaires est passé de 1 756 en 2023 à 2 016 en 2024, selon les dernières données du PNLP. En d’autres termes, la maladie a tué plus de 2 000 personnes en un an.
Ce rebond met fin à une tendance à la baisse entamée en 2019, année au cours de laquelle 4 500 décès avaient été enregistrés. « De 4 500 décès en 2019, nous sommes passés à 2 016 en 2024 », souligne un responsable du programme. Une performance fragile, qui pourrait être compromise si les financements extérieurs venaient à être suspendus.
Le nombre de cas notifiés a également diminué : environ 3 millions de malades ont été recensés en 2024, soit une réduction de 13 000 cas par rapport à l’année précédente. Mais ces avancées restent vulnérables sans le soutien des partenaires techniques et financiers.