La mesure vise à assouplir la gestion des dépouilles
La gestion des dépouilles Covid-19 fait couler beaucoup d’encre et de salives au Cameroun. Incompréhensions, réclamations et déviances ont souvent entouré les inhumations que les familles jugent bâclées et humiliantes au regard des diverses traditions. Ainsi, sur saisine du ministre de la Santé publique le 12 mai 2020, le Conseil scientifique des urgences de santé publique (Csup) a réuni ses 14 membres en session le 22 mai dernier. A l’issue de cette concertation, l’équipe présidée par le Pr Koulla-Shiro Sinata a rendu son 6e avis sur la gestion des corps des patients décédés des suites de Covid-19.
Délai d’inhumation
Celui-ci recommande donc principalement que les corps Covid-19 soient inhumés dans un délai n’excédant pas 48 heures. Mais avant, il convient de placer le corps « dans un cercueil hermétique, fermé et zingué, avec ou sans vitre encastrée permettant à la famille de voir le visage du défunt », indique le Conseil dans un communiqué signé par celle qui est par ailleurs secrétaire générale du Minsanté.
L’avis recommande aussi que les familles, « préalablement et dûment informées de la cause du décès, soient autorisées à voir le corps, sans contact physique, avant toute mise en bière et à assister en nombre restreint à l’inhumation, dans le respect des précautions standards ».
Manipulation et transfert de la dépouille interdits
Le Csup désapprouve le transfert de la dépouille en dehors de la ville de survenance du décès. De ce fait, précise-t-il, l’inhumation doit s’effectuer « dans la ville de survenance du décès, au domicile familial s’il y est situé ou dans un cimetière public, dans le cas contraire ». Aussi, la manipulation et l’inhumation du corps qui se faisait soit par la famille, soit par les services de certaines mairies qu’accompagnaient les personnels de santé incombent désormais aux personnels techniques formés et protégés.
Des recommandations faites après le constat fait sur l’existence de nombreuses incompréhensions, réclamations et déviances liées à la gestion des corps du Covid-19. L’instance note que des familles et proches vivent mal la manière dont les dépouilles sont enterrées. Pourtant, l’instance relève pour le déplorer que d’aucuns ont usé de subterfuges, de corruption ou de violence pour récupérer leurs corps afin de leur assurer une sépulture « digne ».
Réglementation et ambiguïté
Au Cameroun, le décret du 14 mars 1974 portant réglementation des opérations d’inhumation, d’exhumation et de transfert de corps stipule que « le corps d’une personne décédée d’une maladie contagieuse doit être placé dans un cercueil hermétique, zingué et soudé ». Toute chose qui en rajoute à la confusion des familles et du Csup.
Et même si dans ses orientations du 24 mars 2020 l’Organisation mondiale de la santé (OMS) note « qu’en l’état actuel des données disponibles sur la maladie à Covid-19, seuls les poumons sont contagieux, comme pour toute grippe pandémique, qu’aucun élément probant ne rapportant une contamination due à une exposition au corps », l’instance suggère que l’élimination hâtive du corps d’une personne morte de Coronavirus soit évitée et, au risque de se contredire, que soit limité autant que possible le déplacement et la manipulation du corps.
Au Cameroun, il est souhaité qu’un texte juridique soit pris pour encadrer la gestion des corps des personnes décédées des suites de maladie épidémique. En rappel, le Conseil scientifique est une instance consultative créée par Manaouda Malachie. Son rôle est d’émettre des avis au gouvernement, afin de lui permettre de prendre des décisions éclairées sur les problématiques des urgences sanitaires.