Le ministère de la Santé publique se dit prêt car, certains postulats de base ont déjà fait l’objet d’une validation par les acteurs nationaux. Mais, cela ne pourra être possible que par le biais des formations sanitaires délivrant un paquet de soins et de services de qualité.
L’information pourrait passer presqu’inaperçue. Tant elle est noyée dans la note de synthèse fournie par la Direction de l’organisation des soins et de la technologie sanitaire (DOSTS) du ministère de la santé publique (Minsanté). « Le challenge à venir est l’instauration de la CSU (Couverture Santé Universelle : Ndlr) dès janvier 2020 », peut-on y lire.
En fait, le Cameroun annonce que la CSU sera effective à cette période-là. Ce d’autant plus que le ministre de la Santé publique, Manaouda Malachie, a informé que le dispositif est suffisamment avancé et que de nombreux instruments juridiques sont déjà prêts. Ce qui est invraisemblable, à en croire les avis de nombreux d’experts consultés.
D’abord parce que la mise en place de cette assurance obéit à des préalables. Ce sont entre autres, la disponibilité des médicaments, l’offre des services, la qualité des soins, le financement et la gouvernance. Et sur la majorité de ces aspects, le Cameroun est loin d’être logé à la bonne enseigne. L’offre des services et la qualité des soins par exemple, demeurent une préoccupation, en témoigne le crédo sur l’humanisation des soins du Minsanté.
Aussi, cette instauration de la CSU « ne pourra se faire que par le biais des formations sanitaires aux normes et délivrant un paquet des soins et de services de qualité. Or on dénombre à l’heure actuelle plus de 3500 formations sanitaires privées illégales à travers le territoire national. D’où l’urgence de cet exercice d’assainissement», explique le DOSTS dans sa note de synthèse.
Arguments et contre-arguments
D’autres sources proches du dossier confient par ailleurs que c’est cette partie technique et de loin la plus importante, qui inquiète davantage. Et donc, voir la CSU instaurée dès janvier 2020 est tout simplement « Impossible », argue un spécialiste de santé publique. Selon lui, il faut au préalable assurer les services de bases que sont entre autres, la vaccination, le VIH/Sida, la tuberculose, le paludisme.
« C’est difficile. C’est un dossier qui nécessite beaucoup de financement (1300 milliards : Ndlr) or avec la guerre au NoSo et Boko haram à l’Extrême-Nord, c’est difficile. L’actuel ministre le veut et travaille beaucoup pour cela mais ça ne dépend pas de lui seul. Ce serait pourtant une grande révolution sociale », confie un responsable de l’Ordre national des médecins du Cameroun (ONMC).
Le Dr Albert Ze, lui, est formel. « On atteint une CSU lorsque le système est capable de fournir des soins adéquats aux populations », explique cet expert en économie de la Santé. Et de poursuivre que « même les pays développés n’ont pas encore atteint la CSU ».
« Le Cameroun est prêt »
Des avis que bat en brèche une source proche du dossier au Minsanté. « Le Cameroun est prêt pour janvier 2020, étant donné que les postulats de base (panier de soins, protocoles de soins, architecture, méthodologie d’immatriculation, capacité contributives) ont déjà fait l’objet d’une validation par les acteurs nationaux et que les projets chèque santé et Financement basé sur la performance sont opérationnels », argumente notre source sous anonymat.
Et note d’optimisme, « Certains éléments comme l’adoption des textes législatifs et réglementaires et la mise en place d’une structure de gestion avec une allocation budgétaire conséquences nécessaires pour la prise en charge du panier de base, pourraient accélérer cette instauration », poursuit-elle.
A ce jour, le niveau d’avancement de cet important dossier fait état de ce que le Groupe Technique National chargé de sa mise en œuvre a transmis aux Services du Premier Ministre certains éléments clés tels que l’avant-projet de loi sur la CSU, le projet de décret créant l’Organe de Gestion ; celui réorganisant le Conseil Supérieur de la santé et la proposition financière de première année de la phase une.