La 18ème Journée africaine de cette branche de la médecine célébrée ce jour a été l’occasion pour le Réseau des parlementaires pour la promotion de la santé et la valorisation de la médecine traditionnelle africaine, de réitérer la nécessité qu’un Projet de Loi soit présenté au Parlement pour une meilleure structuration.
«Toutes les résolutions prises lors des précédentes éditions ou célébrations sont restées jusqu’ici lettre morte ; aucune avancée». Par ces propos, le président de l’Association nationale des tradipraticiens de santé cache mal sa désolation et déplore le peu d’intérêt que continue d’avoir le gouvernement vis-à-vis de la médecine traditionnelle. Pourtant, elle « est utilisée depuis des siècles pour améliorer le bien-être des populations et elle continue de jouer un rôle essentiel dans les soins de santé », reconnait le Dr Matshidiso Moeti, Directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique.
En effet, au Cameroun, « plus de 95% des médicaments sont importés. Des études menées ont révélé qu’environ 80% des populations des pays en développement font appel la médecine traditionnelle pour de soins de santé primaire », a soutenu le Dr Marlyse Mbezele Ndi Peuyou le 25 juin dernier. Ce jour-là, s’est tenu un forum entre les parlementaires, le gouvernement, les chercheurs et tradipraticiens de cette médecine.
L’objectif de la rencontre était de susciter du gouvernement la modernisation, la codification, l’amélioration et la valorisation de la médecine traditionnelle camerounaise. « La représentation nationale, à travers les élus du peuple doit impulser et accompagner cette mutation, cette dynamique qu’on appelle de tous nos vœux », avait alors rappelé Cavaye Yeguié Djibril, président de l’Assemblée nationale (PAN).
Une médecine controversée
Sauf que «depuis près de 18 ans, nous sommes toujours dos à dos avec la médecine conventionnelle », regrette à l’unanimité les membres de l’Association nationale des tradipraticiens de santé (Antrasa). En réalité, elle « suscite de vives controverses et divise les uns et les autres et surtout les scientifiques », a indiqué le PAN. Ce dernier est nostalgique « des potions de grand-mère, et de grand-père, aux multiples vertus connues et reconnues qui guérissaient totalement malgré l’absence à l’époque des centres de santé modernes ».
Pour lui donc, «Le moment est venu de mettre au goût du jour les questions d’intérêt national sur la problématique réelle de la médecine non conventionnelle ». Aussi, il est temps de sortir la médecine traditionnelle de la stigmatisation et de la marginalisation pour en faire un complément essentiel et déterminant à l’offre de santé classique. La 18ème Journée africaine de la médecine traditionnelle célébrée sous le thème: « Deux décennies de médecine traditionnelle (2000-2020: Les progrès réalisés dans notre pays » est venue remettre au goût du jour son importance, et rappeler l’importance de la médecine traditionnelle dans la prise en charge de la santé des populations et de brandir son efficacité aux yeux du monde.
Ce d’autant plus que depuis la pandémie de maladie à coronavirus 2019 (Covid-19), la médecine traditionnelle africaine a été sous le feu des projecteurs. Tradispirituels, tradipraticiens, tradithérapeutes, pharmaciens, naturopathes, des guérisseurs, se réjouissent d’ailleurs de ce que la pandémie au Coronavirus est venue, valoriser la médecine traditionnelle africaine. « Le Covid a permis que la médecine africaine soit reconnue ; on voit enfin notre valeur», affirment ces acteurs.
« Industrie prometteuse »
A en croire la Directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique « La médecine traditionnelle est aussi une industrie prometteuse que les pays africains peuvent exploiter plus et exporter à l’international ». Elle en veut pour preuve, le fait qu’elle « tire sa quintessence de la riche et exceptionnelle biodiversité de plantes aromatiques et médicinales que recèle l’Afrique ». Au Cameroun, ces acteurs ont une plaidoirie auprès du gouvernement : celle d’œuvrer pour leur visibilité et d’une reconnaissance institutionnelle. Le Réseau des parlementaires pour la promotion de la santé et la valorisation de la médecine traditionnelle africaine l’a réitéré au PAN vendredi dernier. Il souhaite qu’un Projet de Loi soit présenté au Parlement pour une meilleure structuration de cette branche de la médecine.
C’était en tout cas, l’une des recommandations faites à l’issue de la rencontre du 25 juin 2020. Susciter une véritable synergie et complémentarité entre la médecine traditionnelle et la médecine conventionnelle et envisager la création des Centres de santé intégrés de la médecine traditionnelle au même titre que les Centres de santé intégrés classiques placés sous la responsabilité de l’Etat ; envisager la création d’un corps de la médecine traditionnelle avec des Centres de formation officiels ou agrées ; intégrer la médecine traditionnelle dans les soins de santé primaire en sont quelques-unes.
« Je lance un appel aux gouvernements, aux institutions universitaires et de recherche, aux praticiens et au secteur privé pour le renforcement de leur collaboration. En travaillant de concert, les parties prenantes peuvent élargir l’accès aux médicaments traditionnels de qualité fournis par des équipes de soins de santé intégrées dans les systèmes de santé nationaux. Mon ambition personnelle est que la médecine traditionnelle africaine soit plus pleinement reconnue sur le plan international », a indiqué le Dr Matshidiso Moeti, Directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique.