Bafia. Les raisons de la suspension du Dr Nguemtcheng Maurice par Manaouda Malachie
Dans l’affaire opposant le directeur de l’hôpital de Bafia et son collaborateur chirurgien, l’arbitrage de l’autorité tutélaire de la santé était vivement attendu. La décision est finalement tombée ce 9 février 2021. Le Dr Nguemtcheng Maurice, chirurgien au sein de cette formation sanitaire publique a été suspendu « de toute activité au sein de cet hôpital pour une durée de 3 mois, éventuellement renouvelable », écrit Manaouda Malachie dans sa décision.
Motif : « Manquement grave à l’éthique et à la déontologie professionnelle ». De plus, « pendant ladite période, l’intéressé est suspendu de solde », précise la décision du ministre de la Santé publique. Lequel a décidé de mettre fin au suspense, en signant cette décision portant suspension du Dr Nguemtcheng. Le Minsanté dit s’être appuyé entre autres, sur le rapport de mission d’investigation et de gestion des problèmes identifiés à l’HD de Bafia du 12 au 13 novembre 2020 et d’une note à sa haute attention. En effet, de sources concordantes, la mission avait été décidée au regard de la crise sociale qui secouait cette formation sanitaire.
D’ores et déjà, acteurs de la santé et les médecins ont réagi à cette décision de la tutelle. « A la place du ministre, j’aurais agi de la même façon », déclare un médecin, chef de District de santé. En réalité, « La suspension du chirurgien était évidente », dit un médecin. « Le chirurgien a dérapé mais on va sanctionner les deux. Le ministre a cité le rapport de la mission du délégué du 12 novembre 2020, qui condamnait le directeur. Il sera sanctionné », soutient un cadre en service à l’administration centrale. Selon un autre, « la sanction du chirurgien est lourde surtout avec suspension de solde ». Pour cette source, il ne s’agit ni plus ni moins que d’une « solidarité » entre manager. Sauf que, le chirurgien de l’avis de nombreux médecins, leur confrère a été « irrespectueux ».
En rappel, cette suspension fait suite à la crise entre le Directeur de cet hôpital, le Dr Mbenda Roger, et son collaborateur, le Dr Nguemtcheng Maurice. Couvant depuis plus d’un an, elle a atteint son point de non retour le 19 janvier dernier, avec la demande d’explication qu’a servi le directeur à son collaborateur. Dans celle-ci, le Dr Mbenda Roger a demandé au Dr Nguemtcheng Maurice de s’expliquer sur ses « absences répétées et devenues classiques ». Des absences qui selon lui, « entravent le bon fonctionnement et mettent en danger la vie des patients », écrit le directeur.
La réponse du Dr Nguemtcheng Maurice ne se fera pas attendre. Le 20 janvier, le chirurgien va nier ces absences dont l’accuse sa hiérarchie et affirme être « toujours présent et que je fonctionne dans le strict respect du programme que j’ai établi comme tous les spécialistes et selon les articulations de mon travail en tant que chirurgien». Selon le Dr Nguemtcheng Maurice, son supérieur hiérarchique cherche « un bouc émissaire pour justifier votre gestion calamiteuse ».
C’est sur ces entrefaites que Manaouda Malachie va demander au délégué régional de la Santé pour le Centre, le Dr Moussi Charlotte, de convoquer les deux médecins et de les entendre. Ils vont finalement s’expliquer le 29 janvier, sur convocation de cette dernière, dans les locaux de cette délégation à Yaoundé.
Merci pour cet article qui rappelle suscintement les faits. Je suis médecin, défenseur des droits des patients et usagers du système de santé au sein de ASSOS santé Cameroun. J’avoue ne pas comprendre la décision du ministre de la santé publique. Pour au moins deux raisons. La première est que les manquements à l’éthique et à la déontologie professionnelle sont constatés par le tribunal des pairs. Le conseil de discipline de l’ordre des médecins, garant de l’observance du code de déontologie médicale.( Confère la loi n°80-07 du 14 juillet 1980 relative à l’organisation de la profession de médecin, en son article 20). Si le chirurgien a commis une faute administrative et non professionnelle, il devrait avoir droit à la hiérarchie des mesures disciplinaires prévues par le statut de la fonction publique, avant la suspension qui est une mesure conservatoire ou extrême, en cas de faute lourde, ou après l’examen du cas de l’intéressé par le conseil de discipline.
Le chirurgien a été lourdement sanctionné, mais nous n’avons pas la preuve que la sanction est proportionnelle à la faute. De plus, une mission en novembre 2020, c’est à dire 2 mois avant le clash épistolaire, avait déjà eu à connaître de la situation et n’a apporté aucun apaisement dans la relation entre les deux collaborateurs. Nous avons connaissance d’une demande d’explication pour absence irrégulière répétée. Ce qui ne constitue pas un manquement à l’éthique et à la déontologie, mais une faute administrative, observée bien à propos par le directeur de l’hôpital. Peut être faudrait il un peu plus de détails pour nous permettre de comprendre les tenants et les aboutissants de cette situation.
Les médecins du public n’ont pas un syndicat, mais je crois que c’est le lieu ici, pour l’ordre des médecins de se saisir du cas, pour comprendre la situation du confère et lui garantir une jugement équitable et juste.
La sanction a un rôle et devrait être proportionnelle à la faute commise, pour avoir tout son sens pédagogique.
Merci infiniment pour ce commentaire assez pertinent. Je suis d’accord avec cet avis. Je suis d’autant plus surprise par le silence de l’Ordre des médecins dans cette affaire…