Tuberculose. Les pénuries de médicaments et des réactifs plombent la prise en charge des patients au Cameroun

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(Lurgentiste.com) – Entre avril 2023 et février 2024, les patients souffrant de tuberculose ont subi 24 semaines cumulées de rupture de médicaments. La sonnette d’alarme est tirée par Positive Generation, une organisation camerounaise de promotion de santé et droits humains issue des communautés de personnes affectées par le VIH/Sida et la tuberculose. Pour cet acteur de la société civile, le Cameroun est « au bord d’une crise sans précédent » dans la prise en charge des patients atteints de tuberculose.

Selon le rapport annuel 2023 de Treatment Access Watch (TAW), l’observatoire communautaire indépendant de l’accès aux soins et services de santé, ces ruptures de stock concernent surtout des antituberculeux en combinaisons RHZE (Rifampicine + isoniazide + Pyrazinamide + Ethambutol) et RH. Ces médicaments représentent respectivement 78 % et 22 % des ruptures qui ont duré six mois. Ce manque a davantage été accentué dans les régions du Littoral, Centre et Ouest, révèle la même source. « Le même rapport présente une rupture de 61,5 % des REHZ entre avril et juin 2023, trimestre qui a connu le plus grand nombre de ruptures », précise le rapport cité dans un communiqué de presse de Positive Generation.

Régression

Le document, rendu public le 24 mars dernier à l’occasion de la journée mondiale de lutte contre cette maladie, interpelle les pouvoirs publics du pays sur « les nombreuses défaillances constatées pendant la prise en charge des patients tuberculeux dans les formations sanitaires ».

Sur 101 formations sanitaires observées par Treatment Access Watch, les résultats annuels issus du terrain montrent un total de rupture de 24 % des antituberculeux, 4 % pour les tests de crachats, 11 % pour le traitement préventif et 5,68 % pour le vaccin BCG. Face à cette « situation alarmante », certains patients (les plus nantis surtout), n’ont pas eu d’autres choix que de débourser jusqu’à 40 000 FCFA pour se procurer deux semaines de traitement. Ceci, dans un contexte où la prise en charge de la tuberculose est gratuite au Cameroun depuis 2004. Vingt ans après, Positive Generation considère que ces manques de tests et des médicaments (préventifs et curatifs) constituent « une grande régression dans la lutte » contre la tuberculose.

Manque de réactifs

Le vol de médicaments est également un phénomène qui plombe la lutte contre la tuberculose. En avril 2023 par exemple, des personnes ont subtilisé « un important stock » d’antituberculeux au magasin du Fonds régional pour la promotion de la Santé du Centre (FRPS-C) logé à la Cename. « Toute chose qui a rendu difficile la disponibilité des médicaments », regrettent les responsables de PG. Au sein de cette organisation, l’on pense d’ailleurs que c’est ce vol qui a aggravé la rupture de médicaments.

L’absence des réactifs pour faire les examens de TB-LAMP et GenXpert après suspicion d’une tuberculose pulmonaire dans certaines villes comme Douala entre février et mars 2024 vient compléter cette liste de défaillances. « Même le Groupe technique régional contacté n’a pas pu donner réponse favorable, lui-même incapable de résoudre cette situation d’une extrême gravité, encore moins de déterminer les dates des prochains ravitaillements dans les Centres de diagnostic et de traitement de la région du littoral », déplore Positive Generation. Non sans rappeler le fait qu’« Il est constant pour le programme d’être incapable de rendre les traitements contre la tuberculose dans les hôpitaux conformément aux directives nationales de l’État du Cameroun ».

En somme, ces manquements constituent « des cas de violation grave des Droits à la santé, bafouent les droits à la santé tout en freinant de manière considérable la progression de la lutte. Si des mesures d’urgence ne sont pas prises, pour résoudre ces problèmes d’une extrême gravité et à répétition, la vie du patient sera toujours en danger », conclut Positive Generation.

Au Cameroun, 25 722 cas de tuberculose ont été notifiés en 2023, selon le Programme national de lutte contre la tuberculose (PNLT). Quatre régions concentrent à elles seules 59 % de notifications des cas de cette maladie infectieuse qui attaque les poumons, toutes formes confondues. Il s’agit du Littoral, notamment la ville de Douala avec 4 534 cas, l’Extrême-Nord (4 282 cas), le Centre (spécifiquement la ville de Yaoundé avec 3 503 cas) et la région du Nord (2891 cas). La tuberculose pédiatrique (enfant de 0-14 ans) totalise 1376 cas tandis que 700 malades ont été dépistés auprès de la population carcérale du pays.

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