VIH/Paludisme/Tuberculose. Le Cameroun peine à mobiliser ses fonds de contrepartie
Ils s’élèvent à 33 milliards de Fcfa et seront reportés à l’année 2020 s’ils ne sont pas payés d’ici là.
Le Cameroun n’a pas tenu ses engagements vis-à-vis du Fonds mondial, principal bailleur de fonds dans la lutte contre le VIH/Sida, le paludisme et la tuberculose. En effet, sur la période d’allocation 2014-2016, le pays s’est engagé à payer 28 milliards Fcfa, représentant les fonds de contrepartie. Soit 20% des financements alloués par le Fonds mondial et réparti ainsi qu’il suit : 16 milliards de Fcfa pour le VIH/Sida ; 8 milliards Fcfa pour le paludisme et 1 milliard pour la tuberculose. Sauf qu’à ce jour, le pays n’a apporté que 2 milliards de Fcfa pour ces fonds et doit encore verser pour le compte de la même période, 26 milliards de Fcfa.
Pour la Période d’allocation 2017-2019, la subvention du bailleur de fonds est de 107 milliards de Fcfa. 58,39 milliards de Fcfa pour VIH/Sida, 42, 93 milliards de Fcfa pour le Paludisme et 6,54 milliards de Fcfa pour la Tuberculose. Avec les nouvelles exigences de la politique de cofinancement (qui exige le versement de 20% de la somme allouée par le Fonds Mondial pour chaque composante de maladie + au moins le montant total des investissements effectués pendant la période de mise en œuvre 2015-2017), 21 milliards de Fcfa étaient attendus du Cameroun en guise desdits fonds de contrepartie.
Pour les années 2018 et 2019, le pays de Paul Biya a plutôt prévu de payer 14 milliards. Cependant, seulement 2 milliards Fcfa ont été décaissés. Sur les deux périodes donc, 48 milliards de Fcfa étaient attendus du Cameroun. Le gap lui, se chiffre à 33 milliards de Fcfa et sera reporté à l’année 2020 s’il n’est pas payé d’ici là. Au ministère de la Santé publique (Minsanté), l’on est peu disert sur la question. Tout au plus, certaines sources soufflent que le dossier a été confié aux administrations compétentes.
Le ras-le-bol des OSC
Réunis à Yaoundé les 26 et 27 juin 2019 pour une consultation multipartite nationale pour l’élaboration et l’adoption du plan de réponse globale aux obstacles liés aux droits humains qui entravent, l’accès aux services de lutte contre le VIH et la tuberculose au Cameroun, les organisations de la société civile (OSC) de lutte contre ces maladies et le paludisme au Cameroun, ont lancé un cri de détresse. « Consternés » et « préoccupés » par cette situation, ces OSC demandent « au gouvernement d’honorer promptement son engagement en débloquant les fonds de contrepartie nécessaires puisque nos vies en dépendant et attirons l’attention de l’opinion publique à se mobiliser ensemble pour assurer les engagements financiers actuels et ceux à venir », peut-on lire sur le document. Selon elles, « l’heure est grave et la situation ne peut plus continuer ainsi ».
Conséquences
Entre temps, les conséquences de cette situation elles, se font ressentir sur la mise en œuvre de l’ensemble des programmes nationaux financés par le Fonds mondial. D’abord, celui de lutte contre le paludisme : la campagne de distribution gratuite des Moustiquaires Imprégnées à Longue Durée d’Action (Milda) pourrait ne pas être conduite dans les régions du Centre et Sud-Ouest. Ce qui causerait une recrudescence de la morbidité et mortalité liées au paludisme. Déjà, la maladie a fait 3263 morts en 2018 et 2 millions 133 mille malades au total, ont été enregistrés dans les formations sanitaires.
Les programmes nationaux de lutte contre le VIH/Sida et Tuberculose eux, connaîtront des ruptures des stocks en cascade. En effet, au moment où le taux de prévalence est de 3,4% au Cameroun, le pays verra une rupture de stocks en ARV dès 2020, comme 24% des besoins assurés par le gouvernement. La tuberculose n’est pas en reste, avec une rupture de stock en antituberculeux de première ligne aussi et un risque d’apparition des résistance (TB-MR et TB Ultra-R). Pourtant, 23 741 personnes souffrent de tuberculose au Cameroun, selon le dernier rapport annuel 2018 dudit Programme.
Diminution des allocations financières
Bien plus. Le Cameroun verra une diminution de l’allocation financière de ce bailleur de fonds pour la prochaine période 2021 – 2023. Il est aussi prévu une retenue de 20% de la subvention en cours, soit 21 milliards de Fcfa, ayant pour conséquence la non-mise en œuvre de certaines activités telles que les interventions sous-directives communautaire (ISDC). Le pays connaîtra aussi une perte de crédibilité et de ses structures vis-à-vis des partenaires. Par exemple, la Cename qui ne paye pas les fournisseurs lesquels ne soumissionnent plus pour les Appels d’Offres lancés par cette structure.
En rappel, la politique d’allocation des fonds a changé depuis le cycle de financement 2014-2016. Il est passé du système des « Round » qui avaient une durée de 5 ans, au « Nouveau Mécanisme de Financement », avec des allocations triennales. Chaque gouvernement a alors une obligation pour chaque triennat, de signer un engagement pour le payement du cofinancement, et surtout la mise à disposition effective desdits fonds.