Grand-Nord. Les morsures de serpent sévissent au sein de la population

Olive Atangana
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Déjà une cinquantaine envenimements et plusieurs décès enregistrés en deux mois.

Ngaoundéré le 9 juillet 2020. Il est 11h quand des sources signalent un autre cas de morsure de serpent. La victime de sexe masculin, est par la suite prise en charge dans une formation sanitaire de la ville. En réalité, ce cas est loin d’être isolé parce que quelques jours avant, c’est la ville de Meiganga qui enregistrait huit cas de morsures de serpent et deux décès. C’est que, les morsures de serpents sont légion dans les trois régions septentrionales du Cameroun.

A titre d’exemple, 34 cas et un décès ont été signalés en deux mois à Tokombéré ; 11 en trois semaines à Poli et un décès déjà enregistrés à Guider. Tels sont quelques cas recensés depuis deux mois. Mais, « C’est l’arbre qui cache la forêt car la majorité des cas de morsures ne se rendent malheureusement pas à l’hôpital et restent en communauté où sont utilisés des outils tels que la pierre noire dont l’effet n’a toujours pas été prouvé », indique le Pr Yap Boum, épidémiologiste et directeur d’Epicentre Afrique, le centre de recherche de Médecins sans frontières (MSF).

Et ce dernier de prévenir : « Si rien n’est fait, les populations s’exposent à une augmentation des morsures de serpents dont les plus sévères entraînent la mort. Il est vraiment indispensable que la communauté toute entière face front à ce problème de santé publique ».  Ce d’autant plus que les zones de savanes sèches et arborées de l’Adamaoua, du Nord et de l’Extrême-Nord représenteraient 77% de la mortalité des envenimations (morsures de serpent) dans le pays. La problématique reste pourtant négligée malgré qu’elle constitue un problème de santé publique.

D’ailleurs en 2017, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a ajouté les morsures de serpents sur sa liste des maladies les plus négligées dans le monde. L’organisation onusienne s’apprête à publier un plan visant à réduire de moitié le nombre de décès et de handicaps causés par les morsures de serpents d’ici 2030. Ce d’autant plus que les personnes les plus touchées sont celles qui vivent déjà dans la pauvreté et les conséquences d’une morsure de serpents sont telles qu’elles deviennent encore plus endettées et désespérées, lorsqu’elles ne décèdent pas.

Accès au traitement : La croix et la bannière

Plus grave, l’accès au traitement demeure difficile. Le Cameroun n’en est pas épargné. En témoigne la tragique histoire du Dr Ben Faycal, jeune Directeur de l’hôpital de District de Poli décédé le 4 novembre 2014 pour défaut de sérum anti venimeux autant à l’hôpital régional de Garoua, au centre Pasteur de Garoua et dans les pharmacies de la ville. A en croire les prestataires de santé, les longues distances entre l’incident et les aires de santé où les équipements sont parfois inadaptés en rajoutent à cette situation.

Et bien que des traitements efficaces appelés anti-venins (représentant le seul traitement efficace contre les morsures de serpents) existent, la grande majorité n’y a malheureusement pas accès.  Les prix élevés des anti-venins (avoisinant 50 000fcfa) et leur disponibilité constituent un obstacle majeur pour de nombreuses personnes.  D’après nos sources, la société Sanofi-pasteur qui produisait le sérum antivenimeux, a cessé de produire cet antidote destiné à sauver les vies des personnes mordues par les différentes espèces venimeuses, depuis 2014.  Bien plus, depuis 2018, les stocks actuels sont en voie de péremption.

Voilà pourquoi, d’après des travaux menés par le Dr Nkwescheu Armand, épidémiologiste, près de 9 personnes sur 10 ayant une morsure de serpent utilisent des pratiques traditionnelles tandis que 4 sur 10 sont pris en charge par des tradipraticiens. Seul 1 patient sur 2 se rend à l’hôpital. « Ce qui retarde la prise en charge et entraîne des risques plus graves de décès et de séquelles », regrette le Pr Yap Boum.

La plus grande crise de santé cachée

Selon l’OMS, les morsures de serpents sont « sans doute la plus grande crise de santé cachée du monde ». En fait, Chaque année, les morsures de serpents venimeux touchent environ 2,7 millions de personnes. Elles sont la cause de plus de 100 000 décès et engendrent des difformités et incapacités physiques à vie pour 400 000 personnes supplémentaires. La morsure de serpent entraîne immédiatement. Aussi, elles entraînent au moins 40 fois plus de décès et au moins 60 fois de plus de handicaps graves et permanents que les mines terrestres.

Dans le monde, une personne meurt d’une morsure de serpent toutes les quatre minutes. Au Cameroun, en l’absence des enquêtes, difficile d’avoir cette information de manière précise. En rappels, les morsures de serpent provoquent une paralysie respiratoire, une suffocation, des troubles hémorragiques, une insuffisance rénale et de graves lésions cutanées nécessitant une amputation. Sans une prise en charge rapide, le venin cause un empoisonnement grave qui peut entraîner la mort en quelques heures seulement.

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Journaliste diplômée de l'École supérieure des sciences et techniques de l'information et de communication (Esstic) au Cameroun. Passionnée et spécialisée des questions de santé publique et épidémiologie. Ambassadrice de la lutte contre le paludisme au Cameroun, pour le compte des médias. Etudiante en master professionnel, sur la Communication en Santé et environnement. Membre de plusieurs associations de Santé et Politique, dont la Fédération mondiale des journalistes scientifiques (WFSJ) et le Club des journalistes politiques du Cameroun (Club Po). Très active sur mes comptes Tweeter et Facebook.
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