Le Syndicat des Médecins du Cameroun convoque aussi, comme l’ONMC, la loi du 10 août 1990 et le décret du 22 juillet fixant les modalités de la loi 90/36 et invite les autorités sanitaires et cet ordre professionnel à se conformer à la loi en vigueur.
L’Ordre national des médecins du Cameroun (ONMC) essuie une avalanche de critiques depuis la sortie de son président le 9 août 2019. C’est que, un désaccord oppose cet ordre professionnel au ministère de la Santé publique (Minsanté), à propos de la loi du 10 août 1990, relative à l’Exercice et à l’Organisation de la Profession de Médecin au Cameroun. Pour le Dr Sandjon Guy, « il n’y a pas de document de création ni d’ouverture à demander aux médecins ». Certains ont ainsi tôt fait d’y voir un bras de fer avec la tutelle ministérielle. D’autres soutiennent qu’il s’agit ni plus ni moins, d’un manque de respect vis-à-vis de la hiérarchie mais aussi et surtout, d’un jeu trouble de l’Ordre qui soutient des médecins installés dans l’illégalité.
Au milieu de cet imbroglio, une voix a tenu à se faire entendre. Celle du Syndicat des médecins du Cameroun (Symec), à travers une correspondance adressée au ministre de la Santé publique. « Il serait inapproprié de notre part de continuer à garder le silence au sujet d’un débat qui décide de l’avenir de la carrière des médecins que nous sommes », écrit-il à Manaouda Malachie. Le ton est donc donné à travers la voix du Dr Bassong Pierre, président dudit Syndicat. Celui-ci dit avoir décidé de « mettre à votre disposition les inquiétudes des médecins au sujet de la lutte contre l’exercice illégal de la médecine et le respect de la dignité du personnel soignant ».
Respect de la loi
Si le Symec reconnait d’emblée les « brillante (s) action (s) » que « notre corps de métier subit et des réajustements qui auront invraisemblablement un impact sur l’avenir voire la survie de notre profession », il milite néanmoins pour un respect strict de la Loi. Ce n’est autre que celle du 10 Août 1990 (que convoque aussi plus haut l’ONMC) et son décret d’application : Décret du Premier ministre du 22 juillet 1992, fixant les modalités de la loi susmentionnée. En effet, en son article 19 (1), ledit décret précise que : « L’exercice de la médecine en clientèle privée est autorisé par décision du Conseil de l’Ordre ».
Et de poursuivre en son article 21(1) : « L’autorisation d’exercice en clientèle privée est personnelle et incessible. Elle indique la localité où le postulant est appelé à exercer son art. Elle est accordée pour permettre de travailler dans une formation sanitaire privée, ou pour ouvrir une formation sanitaire privée ». Le Symec convoque aussi l’alinéa 2 du même article et plus tard, les articles 23 (1 et 2) ; 24 (1 et 2). Lequel stipule donc que « L’ouverture de la formation sanitaire au public n’est autorisée qu’après vérification du Conseil de l’Ordre et l’Administration chargée de la santé publique, des modifications exigées ».
Soutien sans faille
Tout semble donc clair. Sauf que : « Bien que les interprétations soient nombreuses, et que nous comprenions l’envie des uns et des autres de contrôler ce processus d’installation en clientèle privée, il semble clair aux yeux de tous selon l’alinéa 2 de l’article 21 et article 24 alinéa 1 suscités que l’autorisation de travailler dans une formation sanitaire privée ainsi que l’autorisation à ouvrir une formation sanitaire privée sont délivrées par l’ONMC à condition de respecter la carte sanitaire et d’avoir des installations qui permettent d’exercer la profession selon les règles minimales de l’art », poursuit le Symec.
Même s’il invite par ailleurs les autorités sanitaires et le Conseil de l’ONMC « à se conformer strictement la loi en vigueur qui ne pose aucune ambiguïté à nos yeux », en réalité, le Symec a voulu apporter son soutien à l’ONMC à travers cette sortie. Au Minsanté, les sources proches du dossier n’ont pas souhaité s’exprimer, tout comme celles du Conseil de l’Ordre. Néanmoins, une autre soutient que le Minsanté est dans son droit.
Piques et répliques
En fait, « Ils (médecins : Ndlr) sont obnubilés par l’appât du gain » et veulent absolument « protéger leur bifteck au détriment des vies des populations ». Ce à quoi le Dr Sandjon argue que l’ONMC délivre moins de 20 autorisations d’exercice en clientèle privée après avis obligatoire de la tutelle. « Or, lors du dernier décompte, nous étions à plus de 3400 formations sanitaires illégales. Un calcul rapide montre que si l’ONMC était en cause, il lui faudrait plus de 150 ans pour cela », précise le président.
A en croire un médecin, « Quand l’interprétation des textes en vigueur créée autant de remous, c’est qu’il y a problème et que les textes doivent être revus de façon multilatérale et sans exclusion ». Et donc, « La solution c’est la réforme du système de santé », tranche ce dernier.
Encadré
Mise au point
L’exercice illégal de la profession n’était pas le seul point sur lequel a souhaité s’appesantir le Syndicat des médecins du Cameroun (Symec). En fait, il a aussi voulu faire entendre sa voix par une mise au point de certaines autres points essentiels mis au-devant de l’actualité ces dernières semaines. D’abord, sur l’interdiction des jeunes médecins à exercer sans supervision.
De ce fait, ce syndicat « regrette d’une part un sentiment de dénigrement crée par cette interdiction et d’autre part, l’absence des mesures d’accompagnement y afférentes (…) Une telle mesure à notre avis sans réajustement des délais d’affectation serait contre-productive en matière de performance et rendement ».
« Mise en scène et frustration »
Une interdiction qui n’est pas sans conséquence car la supervision de leurs « jeunes confrères se retrouvant seuls dans les Centres médicaux d’Arrondissement » s’en trouve menacée. Bien plus, « Cette mesure a malheureusement entraîné un rejet systématique des demandes même de service volontaire de nos jeunes confrères au sein des formations sanitaires publiques ».
Les sanctions en cascade qu’inflige Manaouda Malachie aux personnels de santé ne sont pas en reste. De ce fait, le Symec « plaide auprès des autorités sanitaires qu’en toute circonstance, soit préservée la dignité du médecin ». Selon ce syndicat, « Une sanction ne devrait perdre son objectif pédagogique pour devenir une humiliation. Ainsi la mise en scène des sanctions du personnel soignant et des interrogatoires en mondovision ont suscité une frustration sans précédent au sein de notre communauté ».