Dr Danielle Essomba : « Il faut entretenir une activité sexuelle régulière pour éviter la sécheresse vaginale»
La gynécologue-obstétricienne en service à l’hôpital régional de Garoua explique comment les femmes peuvent venir à bout de cette affection gênante, donne des conseils et astuces. Lire l’interview.
Comment peut-on définir la sécheresse vaginale dont souffrent de nombreuses femmes ?
On parle de sécheresse vaginale quand les tissus du vagin ne sont pas suffisamment lubrifiés. Ce trouble est fréquent et touche presque toutes les femmes après un certain âge. La réduction des hormones sexuelles féminines produites par les ovaires, qui se réalise inévitablement pendant la ménopause, représente la cause la plus fréquente de sécheresse vaginale. Les hormones pendant l’âge de fertilité en effet favorisent la sécrétion de substances lubrifiantes dans le vagin en favorisant une bonne lubrification qui rend le rapport sexuel plus confortable.
Quels sont ses symptômes ?
La sécheresse vaginale se caractérise par des démangeaisons, voire une sensation de brûlure au niveau du vagin ; une douleur pendant le rapport sexuel, ou encore des infections urinaires ou vaginales fréquentes. Les femmes souffrant d’une sécheresse vaginale peuvent également être plus sensibles aux inflammations et infections vaginales accompagnées de démangeaisons ou de pertes odorantes.
A quoi est-elle due ?
La sécheresse vaginale est causée par une modification de la glaire cervicale qui s’écoule dans le vagin et des muqueuses vaginale et utérine. Durant certaines périodes de la vie, la muqueuse vaginale se modifie et se fragilise. Elle peut perdre en élasticité et perdre de sa qualité hydratante et acidifiante ainsi que sa capacité d’auto-nettoyage. Plusieurs facteurs peuvent être à l’origine de la sécheresse vaginale : l’arrêt de production d’hormones féminines par les ovaires (comme les œstrogènes et la progestérone) durant la ménopause ; les variations du cycle menstruel ; le tabac ; le stress ; la fatigue ; la grossesse ; l’allaitement ; une mauvaise hygiène intime ; la prise de certains médicaments ; l’alcool… Certains médicaments, notamment ceux qui sont utilisés pour le traitement de l’endométriose, la thérapie utilisée pour le traitement du cancer du sein, la dépression, le stress sévère et l’abus d’alcool peuvent entraîner également une sécheresse vaginale.
Comment avoir une sexualité épanouie lorsqu’on souffre de sécheresse vaginale ?
La sécheresse vaginale est souvent source de gêne et de douleur lors du rapport sexuel. C’est pour cette raison que le recours aux lubrifiants peut s’avérer utile. Attention, l’utilisation de ce type de produit nécessite une très grande précaution. Pensez à demander conseil auprès de votre pharmacien ou médecin. De préférence, optez pour des lubrifiants à base de silicone ou d’eau à ceux qui sont à base d’huile ou de vaseline et qui risquent de rendre les préservatifs poreux et d’irriter les muqueuses. Certains lubrifiants contiennent de l’acide hyaluronique, de la vitamine PP et du glycérol. Ces produits ont l’avantage de réhydrater et de lubrifier en même temps le vagin. Cette réhydratation peut durer de quelques heures à quelques jours. Ces gels conviennent particulièrement aux femmes ménopausées pour une utilisation quotidienne. Ces produits ont souvent un pH proche du vagin, en général avec un pH de 4,5. Il est conseillé d’appliquer le lubrifiant sur le partenaire ainsi qu’à l’ouverture du vagin.
A quoi servent les hydratants vaginaux dans la sécheresse vaginale ?
Les hydratants vaginaux (en anglais : vaginal moisturizers) permettent d’agir sur le tissu vaginal, notamment en augmentant la quantité d’eau dans les cellules de la paroi vaginale. A la différence des lubrifiants qui n’altèrent pas les tissus vaginaux, les hydratants peuvent permettre de soigner la sécheresse vaginale en partie. En général, les hydratants vaginaux sont appliqués 2 à 5 fois par semaine dans le vagin et à son ouverture. L’acide hyaluronique est une molécule hydratante souvent à privilégier. Mais comme on l’a vu ci-dessus, il existe aussi des produits qui ont une fonction à la fois lubrifiante et hydratante.
Comment venir à bout de cette sécheresse vaginale ?
Le traitement hormonal à base d’œstrogènes utilisé en général sous forme de crème vaginale, d’ovule vaginal ou suppositoire vaginal, d’anneau (ring) vaginal voire de gel constitue un remède efficace contre la sécheresse vaginale. Ils sont indiqués surtout dans des cas avancés de sécheresse vaginale. Pour les cas moins avancés, les lubrifiants et hydratants sont davantage recommandés. Certains produits comme par exemple des ovules ou comprimés vaginaux contiennent en plus d’une hormone comme l’estriol également des bactéries de type Lactobacillus acidophilus. Lorsque les oestrogènes sont appliqués au niveau local (vagin), la sécurité de ces produits est bonne. C’est-à-dire que les études ne montrent pas un risque statistiquement plus élevé de cancer du sein ou de formation de caillots sanguins.
Quels remèdes naturels contre elle ?
De nombreuses plantes comme la sauge, le soja, le lin ou la cimicifuga sont connues pour leurs bienfaits contre la sécheresse vaginale. Grâce à leur teneur en phytooestrogènes, elles ont la faculté d’activer l’hydratation naturelle du vagin. Le trèfle rouge possède également ces vertus et peut être prescrit en cas d’insuffisance de l’humidification du vagin. Malgré l’efficacité de ces plantes, évitez l’automédication. L’avis d’un médecin phytothérapeute reste indispensable car les phytooestrogènes peuvent être contre-indiqués chez certaines personnes.
Quels conseils et prévention ?
Limiter les toilettes intimes à deux fois par jour afin d’entretenir l’équilibre de la flore de Döderlein ou flore vaginale ; utiliser un produit qui ne risque pas de nuire à l’acidité de la flore vaginale lors des toilettes intimes, un savon doux au PH neutre par exemple. Ne pas utiliser trop régulièrement des protège-slips et des tampons car leur capacité d’absorption peut à long terme contribuer à dessécher le vagin. Eviter de porter des pantalons trop serrés qui peuvent irriter la vulve à cause du frottement. Les sous-vêtements en coton sont également à privilégier. Entretenir une activité sexuelle régulière qui va permettre d’améliorer la circulation sanguine des organes génitaux et de prévenir le risque d’atrophie. Privilégier les préliminaires lors des relations sexuelles afin de favoriser l’humidification naturelle. Evacuer le stress et reprendre confiance en soi. Se protéger à l’aide d’une légère application de crème de jour avant de nager.