En deux semaines, le Cameroun a vacciné 9920 personnes au total avec l’un des deux vaccins disponibles. Soit 9071 personnes avec Sinopharm tandis que 849 ont opté pour AstraZeneca introduit dans le circuit le 19 avril. C’est du moins ce qu’indique au 26 avril, l’évolution de l’utilisation des vaccins au Cameroun, pour 0,7% de couverture vaccinale au 25 avril 2021. Suffisant pour soutenir que, « La vaccination est timide sinon c’est même un échec », critique d’ores et déjà un médecin de santé publique en service au ministère de la Santé publique (Minsanté). Un avis que partage cet autre haut responsable de ce ministère.
Selon lui, le fait pour le pays de n’avoir pas pu atteindre 10 000 personnes vaccinées depuis le lancement de sa campagne de vaccination le 12 avril dernier « est la preuve que cette campagne est non seulement timide, mais aussi et surtout mal menée, avec une communication approximative ». Ce dernier déplore notamment « des ajustements sur les populations cibles ». Or, « La priorité vaccinale doit être martelée au profit des personnels de santé en office et des personnes de plus de 50 ans vivant avec les comorbidités ». C’est que, depuis le 26 avril dernier, les autorités sanitaires camerounaises ont décidé d’étendre la cible de la vaccination contre le Covid-19 à d’autres groupes cibles autre que les personnels de santé. Sont ainsi désormais concernés, les personnels de santé de plus de 18 ans, les personnes vivants avec les comorbidités de plus de 18 ans et de toute personne de plus de 18 ans.
Polémique autour de la nouvelle cible
Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce choix de la cible de plus de 18 ans ne fait pas l’unanimité. Selon une frange, dans la mesure où le Covid-19 est d’abord une maladie opportune qui s’aggrave avec les comorbidités, il n’est pas nécessaire de faire vacciner les plus de 18 ans. « Ils n’ont pas déterminé le pourcentage des personnels de santé de plus de 18 ans sur la population totale. Tout comme pour les plus de 18 ans vivants avec comorbidités. Cette cible n’atteint pas 30% de la population camerounaise», argumente un cadre au Minsanté.
Sauf que, « Ce n’est pas les plus de 18 ans de manière générale. Ce sont ceux qui ont des comorbidités et celles-ci ne sont pas seulement chez les personnes âgées. Les drépanocytaires, les insuffisants rénaux, les diabétiques de type 1 se comptent aussi chez les moins de 18 ans. C’est pourquoi on les a mis dans ce lot de comorbidités, de personnes à risque. Ce n’est pas parce qu’ils sont jeunes qu’ils sont moins à risque. Ils ont des comorbidités qui les mettent en situation de vulnérabilité c’est la comorbidité », justifie le Dr Daniel Mabongo, épidémiologiste de terrain. Par conséquent, « le cible de 18 ans ne devrait pas porter à équivoque. La comorbidité ne tient pas compte de l’âge. Maintenant les plus de 18 ans parce que les données de vaccination sur les moins de 18 ans ne sont pas encore connue », précise ce dernier.
En réalité, ils représentent environ 2% des patients qui ont les comorbidités d’après les données du Sitrep. « Mais l’orientation ici ce n’est vraiment pas le pourcentage qu’ils représentent. Le rationnel c’est que quel que soit l’âge ils ont des comorbidités. Il faut donc les protéger à même temps. Parce qu’autant la mortalité est élevée chez les personnes âgées vivant avec les comorbidités, autant elle l’est chez ces jeunes. Donc c’est la pression de la comorbidité qui est le rationnel derrière l’inclusion des plus de 18 ans », ajoute le Dr Mabongo.
Campagne de vaccination intensive
Dès ce 28 avril 2021, une campagne de vaccination « intensive » contre le Covid-19 démarre au Cameroun. Il s’agit précisément des « mini campagnes » organisées à chaque poste de vaccination. Jusqu’au 2 mai prochain, cette opération se fera dans tous les 243 centres de vaccination en stratégie fixe et mobile. Elle est organisée selon le ministre de la Santé publique, en raison de l’urgence d’atteindre une couverture vaccinale d’au moins 70% pour les groupes cibles concernés. « L’objectif pour la vaccination Covid-19 c’est couvrir la population à un fort pourcentage pour atteindre l’immunité collective. Vacciner 70% des groupes cibles ne peut pas couvrir ce que nous recherchons », fait savoir notre médecin de santé publique.
En tout cas, ces précisions sur les nouvelles cibles ont été faites par Manaouda Malachie, dans une correspondance adressée aux 10 délégués régionaux de la santé publique. Selon l’autorité tutélaire de la santé, la décision fait suite à la réception par le Cameroun le 17 avril 2021 de 391 mille 200 doses du vaccin AstraZeneca et à sa distribution dans toutes les régions. Ce vaccin vient s’ajouter aux 200 mille doses de Sinopharm avec lesquelles le pays a démarré sa campagne de vaccination le 12 avril dernier. « Les objectifs de la vaccination ne sont pas claires. Le gouvernement doit clairement définir ce qu’il veut atteindre avec la vaccination. Il faut que le Cameroun affine ses objectifs », plaide le médecin de santé publique. En rappel, au 14 avril, les chiffres officiels faisaient état de 65 998 personnes infectées, 991 décès et un taux de létalité de 1,5%.