Cameroun. Le 2e assassinat de Tsanou Rosmann
Il a été commis par un corps médical photographe plutôt qu’urgentiste, et peu soucieux de sauver la vie à cet élève de seconde violemment poignardé par trois de ses camarades de classe du lycée de Deido.
La scène choquante dans ce qui tient lieu de salle des urgences de l’hôpital de district de Deïdo à Douala. Tsanou Rosmann, 17 ans, gravement poignardé au thorax est entre la vie et la mort, gisant sur une civière. Deux urgentistes essayent de lui sauver la vie: l’un en lui administrant un massage cardiaque, sans défibrillateur; l’autre muni d’une sonde pour incubation endo-tracheal avec ballon. Vaine tentative : l’adolescent trépasse ! L’instant est macabre ! Et pourtant, ces dernières et éprouvantes secondes de vie du jeune élève du Lycée de Deïdo sont filmées, tel un concert par une horde d’infirmières en blouse armées de smartphone en pleine salle des urgences. L’indécence est à son comble ! Sauver Rosmann ne préoccupe visiblement pas cette partie du personnel sanitaire. La vie du gamin semble même reléguée au second plan pour ces infirmiers qui, avec une rare insouciance, se montrent plus concentrée à réaliser des photos et vidéos de la mort tragique du jeune élève. Outre le personnel médical, de nombreuses personnes étrangères au service, entrent dans la salle des urgences, et en sortent comme bon leur semble. Et pour ne rien arranger à leur ubuesque manège, nos photographes en blouse ont réussi l’exploit de répandre les images du corps inerte du défunt à travers les réseaux sociaux. C’est le deuxième assassinat de Tsanou Rosmann. Il est commis cette fois, par un corps médical photographe plutôt qu’urgentiste, et peu soucieux de sauver la vie à cet élève de seconde.
Le moins qu’on puisse dire c’est que l’attitude de ce personnel de santé laisse pantois. Comment des femmes, maman de surcroît infirmière peuvent-elles faire preuve d’une telle insensibilité face à un gamin agonisant. Doit-on comprendre qu’au Cameroun, l’hôpital est devenu un lieu où l’on traite les patients sans le moindre humanisme ? L’hôpital est-il finalement devenu un lieu où l’on trouve la mort, en lieu et place de la vie ? Au moment où s’est tenue le conseil des majors de cette Fosa convoqué en urgence avec pour ordre du jour le respect de l’éthique professionnel, de la déontologie et de la confidentialité dans la pratique des soins, l’opinion publique était en droit d’attendre des sanctions sévères contre ce corps médical, que certains ont tôt fait de qualifier d’indigne de cette profession. Malheureusement, des responsables de cette Fosa ont tôt fait de dire qu’il s’agissait simplement d’une réunion mensuelle normale n’ayant aucun lien avec ce macabre événement. Les espoirs sont à présent tournés vers l’enquête prescrite par le ministre de la Santé publique, Manaouda Malachie, « en vue de déterminer prioritairement les responsabilités dans cette affaire ». Vivement qu’elle n’accouche pas d’une souris.