D’après les officiels de la santé, elle va complètement changer le visage sanitaire de notre pays.
Les villes de Yaoundé et Douala compte respectivement 17 % et 14 % de l’ensemble des formations sanitaires du pays. Pourtant, elles n’ont que 2 % de formations sanitaires publiques. En fait, l’offre de soins et services de santé dans ces deux grandes métropoles y est dominée par les formations sanitaires privées laïques à but lucratif. Soit 85 % pour la première métropole, capitale politique et siège des institutions, et 84 % pour la deuxième, capitale économique. Dans les détails, cette dernière, qui abrite 22 % des formations sanitaires tous statuts confondus, ne compte que 8 % des formations sanitaires publiques.
Cette couverture en formations sanitaires publiques est moyenne dans les régions du Sud (66 %), Sud-Ouest (63 %), du Nord-Ouest (60 %), du Centre hors Yaoundé (55 %), de l’Ouest (54 %) et du Littoral hors Douala (52 %). Par contre, les régions du Nord et de l’Extrême-Nord elles, dépendent à 86% totalement des formations sanitaires publiques. Il en est de même pour celle de l’Adamaoua (72 %) et de l’Est (71 %), d’après ces données présentées par le ministre de la Santé publique (Minsanté), Manaouda Malachie, au cours d’une séance d’information des parlementaires sur «La politique du gouvernement en matière de développement des infrastructures de santé : état des lieux et perspectives» le 11 décembre 2020.
D’où l’arrêté fixant la carte sanitaire du Cameroun pour la période 2021-2025 signé le 25 mai 2021 par l’autorité tutélaire de la Santé au Cameroun. Elle actualise la précédente, vielle de 10 ans et « va complètement changer le visage sanitaire de notre pays. Cet instrument d’organisation et de structuration de notre système de santé va guider la création de nouvelles formations sanitaires, la redistribution des paquets de travail au niveau de l’ensemble du pays et je crois que c’est quelque chose qui va mettre en place les mécanismes pour atteindre la Couverture santé universelle», soutient Manaouda Malachie.
A « la base de la planification en santé », elle redéfinit la représentation géographique, structurelle et fonctionnelle des formations de santé réparties sur l’ensemble du territoire national par catégorie, domaine d’activité ou spécialité. Par exemple, une distance minimale de 5 kilomètres est requise pour les formations sanitaires publiques de même catégorie tandis que dans les deux plus grandes métropoles du pays, c’est une distance minimale de 300 mètres qui est obligatoire entre deux formations ou structures sanitaires privées.
Défis d’implémentation
« Notre objectif aujourd’hui c’est de densifier et de donner une qualité de soins de santé irréprochable aux populations et maintenant nous attaquer par la même occasion aux soins de santé spécialisés. Nous avançons de manière progressive mais très sûre », indique le Minsanté. Confiant. Il répondait ainsi aux récriminations à propos des déserts médicaux, du manque de médecins spécialistes, de personnels et d’infrastructures de prise en charge en zone rurale. D’après ce dernier, l’actualisation de la carte sanitaire permettra donc une extension de l’offre de soins. Ce d’autant plus que la loi transfère la création, la construction et la gestion de certaines formations sanitaires aux collectivités territoriales décentralisées (CTD). « La création d’une formation sanitaire publique relevant des compétences transférées aux collectivités territoriales décentralisées est constatée par un acte de l’exécutif de la CTD concernée, après avis formel du ministre de la Santé publique », stipule l’arrêté.
De l’avis des acteurs du secteur de la santé au Cameroun, cette nouvelle carte sanitaire fait d’ores et déjà face à un défi d’implémentation. « Elle ne résoud par certains problèmes. Par exemple la carte, selon la répartition, un District de santé devrait couvrir une population de 50 mille habitants. Quand vous prenez par exemple le District de santé d’Efoulan à Yaoundé 3, cet arrondissement à lui seul compte près d’un million d’habitants. Ce qui voudrait dire que ce seul le district ne suffit plus aujourd’hui. On a vu la nouvelle répartition de la carte mais maintenant, il faudrait qu’elle soit implémentée. Jusqu’ici on a vu quelques nouveaux Districts et CMA (Centre médical d’Arrondissement : Ndlr) çà et là. Aujourd’hui, le District de santé d’Efoulan par exemple, s’il faut s’en tenir aux normes, devrait être segmenté au moins en 5 districts. Ça veut dire que si on prend seulement la ville de Yaoundé, elle donnerait 20 Districts de santé », argumente l’un d’eux.
Par conséquent, « Il y a encore un défi d’implémentation sur le terrain », soutient ce dernier. D’après Manaouda Malachie, globalement, la densité des formations sanitaires s’établit au niveau national à environ 4227 habitants/formation tous statuts confondus, et 9113 habitants/formation sanitaire publique. « Elle devrait changer le visage des soins de santé au pays mais il faudra maintenant que la pratique suive. Que tous les hôpitaux soient catégorisés et respectent leurs catégories ; que la création et l’ouverture respecte scrupuleusement les textes, que le régulateur qu’est l’Etat puisse rétrograder ou upgrader les formations sanitaires en fonction de la carte sanitaire », préconise un médecin, directeur d’hôpital de District. En tout cas, « C’est la mise en œuvre de ses implications qui donnera la valeur au document », conclut un médecin de santé publique au Minsanté.