Allaitement. Ces croyances et préjugés qui « gâtent » le lait maternel

(Lurgentiste.com)- Les pédiatres consultés sont unanimes. « Le lait maternel ne se gâte pas », ont-ils martelé. D’abord parce que « C’est un aliment qui est là à volonté et qui s’adapte à la croissance du bébé selon l’âge. La maman peut le lui donner à volonté, même jusqu’à 2 ans. Le lait ne se gâte pas. Il faut rassurer les mamans », indique le Dr Marie Foe, pédiatre. Ensuite, « Parmi les armes que la nature offre à cet être fragile, il y a le lait maternel. Ceci me semble d’abord une base pour comprendre l’importance de donner à son petit le lait maternel », ajoute le Dr Clémence Vougmo, pédiatre néonatalogiste.

Pourtant, la croyance selon laquelle le lait maternel « se gâte » est répandue au sein de la société camerounaise. Médecine moderne et traditionnelle sont aux prises à cet effet. « Comment comprendre et expliquer que ce même lait qu’offre la nature pour assurer les besoins oh combien importants de l’enfant puisse se gâter ? », s’interroge le Dr Vougmo. En fait, selon plusieurs témoignages, certains comportements sont à l’origine de cette « fausse croyance ».

Notamment les coliques des bébés, la consommation de certains aliments comme le macabo, les jus gazeux, les sucreries, la banane plantain non mur, la reprise la reprise des rapports sexuels au sein du couple, communément appelé « traverser l’enfant ». Pour ce dernier cas précisément, « Le fait d’arrêter d’allaiter le bébé à cause d’une croyance aussi fausse et irréelle entraîne malheureusement le risque que l’enfant décède de diarrhée, d’infection respiratoire grave », prévient le Dr Vougmo.En effet, « Sur un plan purement médical les rapports sexuels ne gâtent pas le lait. On dit aussi qu’il y a certaines maladies qui gâtent le lait. Mais en fait il n’en est rien », renchérit le Dr Patrick Ngou, pédiatre.

Hypothèses

Pour ce médecin, « Beaucoup de choses qu’on rencontre dans la pratique quotidienne peuvent expliquer le fait que les mères pensent que le lait est gâté ». Et celui-ci d’expliquer : « Quand la mère passe une journée ou deux sans allaiter elle a les seins qui sont engorgés, qui font très mal et qui peuvent donner de la température. Donc avec ces signes qui sont plus en rapport avec l’engorgement, la maman peut avoir peur que son lait soit gâté. Or le lait est très bien conservé. Il faut juste presser et verser ».  Selon lui, tout part de « l’ancien temps »« dans la culture, on a fait comprendre aux parents que les rapports gâtent le lait ».

En fait, « gâter le lait voulait dire que tu peux concevoir pendant que tu es entrain d’allaiter et ça peut te contraindre à arrêter rapidement l’allaitement maternel. C’est de là qu’est partie cette notion », précise ce dernier. L’autre hypothèse « c’est qu’il y a des enfants qui de façon naturelle, font les selles après chaque tétée. C’est physiologique. La mère peut se dire que c’est la diarrhée or ce n’est pas le cas. C’est la fausse diarrhée du nourrisson mais il y a des mères qui ont arrêté le sein pensant que le lait était gâté alors qu’il n’en était rien », poursuit-il.

Dangers

Dans tous les cas, Dr Vougmo, par ailleurs Présidente de l’Association Viallaite martèle :  « Il faut que le public, les mamans, les papas et la communauté toute entière comprennent que cette croyance est archi fausse. Quel que soit ce que la mère est entrain de faire c’est-à-dire avoir des rapports sexuels, traverser l’enfant ou autre, le lait maternel ne se gâte jamais lorsqu’on reprend les rapports sexuels». Le danger avec la reprise des rapports sexuels avec son conjoint selon elle, est plutôt que la mère risque de contracter une nouvelle grossesse alors qu’elle ne s’est pas suffisamment remise de la précédente et que le bébé est encore tout petit.

« Voilà chères mamans et papas, ce qu’il faut craindre », à en croire le Dr Vougmo. C’est que, ceci peut avoir de lourdes conséquences pour la mère comme pour le fœtus. « Pour la mère, une grossesse qui survient à moins de 6mois par exemple après le précédent accouchement peut être responsable de saignement important après l’accouchement mettant en danger la vie de la mère. Pour le fœtus, il augmente le risque d’avortements, de morts nés, de naissances prématurées, de malnutrition », explique la pédiatre néonatalogiste.

Elle conseille donc de se rendre dans un service de planification familiale « choisir une méthode contraceptive afin de ne pas avoir des grossesses trop rapprochées ». Et pour terminer, le Dr Ngou rassure que même lorsqu’une maman n’a pas allaité son bébé pendant deux semaines, elle ne doit pas le sevrer pour autant. « Elle peut toujours continuer à lui donner le sein si la montée laiteuse est là. Si elle est inquiète, elle presse le premier lait, elle le verse et elle continue à allaiter son bébé », prescrit-il. La 31e semaine mondiale de l’allaitement maternel en cours depuis le 1er août dernier est donc l’occasion pour ces professionnels de la santé de d’insister sur cette pratique auprès des mamans et de la communauté entière.

 

 

Olive Atangana

Journaliste diplômée de l'École supérieure des sciences et techniques de l'information et de communication (Esstic) au Cameroun. Passionnée et spécialisée des questions de santé publique et épidémiologie. Ambassadrice de la lutte contre le paludisme au Cameroun, pour le compte des médias. Etudiante en master professionnel, sur la Communication en Santé et environnement. Membre de plusieurs associations de Santé et Politique, dont la Fédération mondiale des journalistes scientifiques (WFSJ) et le Club des journalistes politiques du Cameroun (Club Po). Très active sur mes comptes Tweeter et Facebook.

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